Elcésaïtes

Elcésaïtes

Elcésaïtes

Les Elcésaïtes, Helcésaïtes ou Elcésaïens, étaient une secte judéo-chrétienne de tendance gnostique qui apparut en Arabie, dans le voisinage de la Palestine[1], et vécut du début du IIe siècle à la fin du IVe siècle[2]. Selon Épiphane, Eusèbe, Hippolyte et Théodoret, la secte tirait son nom de son fondateur, 'Hλξαί (Elxaï), 'Hλχασΐ (Elkhasi) ou 'Ελκεσαΐ (Elkesaï - Elcésaïe)[2], dont les disciples disaient qu'il était descendu du ciel et avait été annoncé par les prophètes[3]. Épiphane les nommait également Samséens, Sampséens ou Schamséens, sans doute du mot hébreu shemesh signifiant soleil[1] ; d'autres encore les ont appelés Osséens ou Osséniens[1]. Proche des Ébionites, les Elcésaïtes développèrent leur théologie propre.

Selon Origène, les Elcésaïtes repoussaient la plupart des livres du canon sacré, entre autres les épîtres de Saint Paul, et n'admettaient seulement que quelques passages tirés de l'Ancien Testament et des Évangiles[4]. Ils reconnaissaient un Christ, un Messie, qu'ils appelaient le Grand Roi et lui donnaient une forme humaine mais invisible qui mesurait environ trente huit lieues de haut[3]. Toujours selon Origène, les Elcésaïtes affirmaient que le Christ, né dès le commencement du monde, n'était autre chose qu'une vertu céleste qui s'était déjà manifestée sous divers corps et qui après son union avec le Saint-Esprit, avait paru sous la forme de Jésus[4]. Ils donnèrent au Saint-Esprit le sexe féminin, peut-être à cause du mot hébreu Rouah (Souffle) qui est du genre féminin ; cela pour ne pas donner deux pères à Jésus[3]. Elxaï faisait observer par ses disciples les principales cérémonies de la loi de Moïse, le sabbat, la circoncision mais défendait les sacrifices et faisait du mariage une prescription formelle. Au IVe siècle, sous Valens, deux sœurs de la famille d'Elxaï, qui se nommaient Marthe (« Maîtresse ») et Marlène, ou Marthana (« Notre Maîtresse »)[2], étaient considérées par les Elcésaïtes comme des Saintes[3].

Sommaire

Histoire

Hippolyte de Rome nous dit que, sous le pape Calixte Ier (217-222), un fourbe appelé Alcibiade, originaire d'Apamée en Syrie, arriva à Rome porteur d'un livre dont il disait qu'il lui avait été remis au pays des Parthes par un homme juste appelé Elcesaïe ou Elxaï. Le contenu de ce livre avait été révélé par un ange de quatre-vingt-seize miles de haut, seize miles de large et vingt-quatre miles d'une épaule à l'autre ; les empreintes de ses pas étaient longues de quatorze miles (21 km) et larges de quatre miles (6 km) avec deux miles de profondeur. Il s'agissait du Fils de Dieu, qui était accompagné de Sa Sœur, le Saint-Esprit, qui avait les mêmes dimensions. Alcibiade fit savoir qu'une nouvelle rémission des péchés avait été proclamée dans la troisième année de Trajan (A.D. 100) et il décrivit un baptême qui devrait communiquer ce pardon même aux pécheurs les plus corrompus.

Adolf von Harnack lui fait dire « avait été proclamée » au lieu de « était proclamée » (comme s'il fallait lire eúaggelisthênai et non eúeggelísthai) et il déduit ainsi que l'on parle d'une année spéciale de rémission comme étant arrivée une fois pour toutes ; Alcibiade n'avait aucune raison de l'inventer si bien que Hilgenfeld a raison de soutenir qu'Elcesaïe a vraiment vécu sous Trajan, comme le supposait Épiphane. En mettant de côté cette explication de Harnack (et aussi sa première conjecture selon laquelle la rémission dans la troisième année de Trajan signifiait que les deux premiers livres du Pasteur d'Hermas avaient été publiés cette année-là), nous voyons que la rémission est offerte par le nouveau baptême. Saint Hippolyte (qui semble considérer Alcibiade comme l'auteur du livre) représente cette doctrine comme un ajustement inventé par celui-ci et correspondant à l'enseignement relâché du pape Calixte Ier, l'ennemi d'Hippolyte (on considère souvent Hippolyte comme le premier antipape).

Origène, qui a écrit un peu plus tard (vers. 246-249), dit que cette hérésie était tout à fait nouvelle ; il semble avoir rencontré Alcibiade, même s'il ne donne pas son nom. N'ayant aucune raison de contester ces témoignages contemporains, nous devons placer vers 220 la première apparition du livre d'Elchasai. Un siècle et demi plus tard, saint Épiphane l'a trouvé en usage parmi les Sampséens, les descendants des premiers Elcésaïtes, et aussi parmi les Osséens et un grand nombre d'autres communautés ébionites.

Le Kitab-al-Fihrist d'Ibn al-Nadim, l'auteur arabe de la fin du Xe siècle, nous montre les Mogtasilah, une secte de Sabéens dans le désert, qui regardaient El-'Hasai'h comme leur fondateur.

Selon Hippolyte, l'enseignement d'Alcibiade avait été emprunté à différentes hérésies. Il enseignait que la circoncision était obligatoire, que le Christ était un homme comme les autres, qu'à plusieurs reprises il était né sur la terre d'une vierge, qu'il s'était adonné lui-même à l'astrologie, à la magie et aux incantations. Pour tous les péchés d'impureté, même contre nature, un deuxième baptême était ordonné « au nom de Dieu très grand et très haut et au nom de Son Fils le grand Roi », avec une adjuration aux sept témoins cités dans le livre : le ciel, l'eau, les esprits saints, les Anges de la prière, l'huile, le sel et la terre. Celui qui avait été mordu par un chien enragé devait courir vers l'eau la plus proche et y sauter avec tous ses vêtements, en utilisant la formule précédente et en promettant aux sept témoins qu'il s'abstiendrait du péché. Le même traitement – quarante jours consécutifs de baptême dans l'eau froide – était recommandé pour la consomption et pour les possédés. D'autres Ébionites au temps d'Épiphane pratiquaient un pareil traitement.

Ce saint nous dit qu’une telle mention avait été faite dans le livre du frère d'Elchasai, Iexai, et que l'hérésiarque était un juif du temps de Trajan. Parmi ses descendants, deux soeurs, Marthus et Marthana, ont vécu jusqu'aux jours d'Épiphane. Elles étaient révérées comme des déesses et la poussière de leurs pieds et leur salive étaient utilisées pour guérir des maladies (cf. Marc 7:33, 8:23, Jean 9:1-11). Voilà qui suggère qu'Elchasai n'était pas un personnage fictif. Sans doute s'agissait-il d'un chef primitif d'une communauté ébionite, à qui Alcibiade a attribué son propre livre.

Nous apprenons par ailleurs d'Épiphane que le livre condamnait la virginité et la continence et rendait le mariage obligatoire. Il autorisait qu'on vénérât des idoles pour échapper à la persécution, pourvu que l'acte restât extérieur et que le cœur le désavouât. On devait prier en se tournant non pas en direction de l'Orient mais toujours de Jérusalem. Tout sacrifice était condamné puisque les sacrifices avaient été offerts par les patriarches ou en vertu de la Loi mosaïque. On rejetait les Prophètes aussi bien que les Apôtres et évidemment saint Paul avec tous ses écrits.

La doctrine elcésaïte se trouvait dans les Homélies et les Recognitions clémentines, surtout dans les premières.

Bibliographie

  • Simon Claude Mimouni, Le Judéo-christianisme ancien, essais historiques, 1998
  • George Robert Stowe Mead, The Book of Elxai, Kessinger Publishing, 2005, (ISBN 978-1417988730)
  • Wilhelm Brandt, Elchasai, ein Religionsstifter und sein Werk : Beiträge zur jüdischen, christlichen und allgemeinen Religionsgeschichte in späthellenistischer Zeit mit Berücksichtigung der Sekten der syrischen Sampsäer und der arabischen Mughtasila mit Wort-, Personen- und Sachregistern, Philo Press, Amsterdam, 1971 (ISBN 9060222695)
  • Gerald P. Luttikhuizen, The Revelation of Elchasai: Investigations into the Evidence for a Mesopotamian Jewish Apocalypse of the Second Century, Mohr Siebeck, 1985 (ISBN 3161449355) Aperçu Google Books

Documents anciens

Voir aussi

Références

  1. a , b  et c Nicolas-Sylvestre Bergier, Dictionnaire de théologie", 1852.
  2. a , b  et c Kaufmann Kohler & Louis Ginzberg, Jewish Encyclopedia, 1901-1906.
  3. a , b , c  et d François André Adrien Pluquet, Dictionnaire des hérésies, des erreurs et des schismes, 1847.
  4. a  et b Ange de Saint-Priest, Encyclopédie du XIXe siècle, 1852.

Liens externes

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