Cour de justice de la République

Cour de justice de la République
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La Cour de justice de la République (CJR) française juge les infractions commises par les ministres pendant l'exercice de leurs fonctions. Elle a été créée par une loi de révision constitutionnelle le 27 juillet 1993 suite à l’affaire dite du sang contaminé et à la multiplication des affaires politico-financières à la fin du second mandat de François Mitterrand. Auparavant, la Constitution confiait à une Haute Cour de justice le soin de juger le président de la République et les membres du gouvernement.

La Cour de justice de la République a son statut et ses attributions fixés par les articles 68-1 et 68-2 de la Constitution.

Sommaire

Statut

Cette cour, de nature constitutionnelle, confère un privilège de juridiction au profit des membres du gouvernement. Le tribunal se compose de quinze juges : douze parlementaires (élus pour moitié par l'Assemblée nationale[1] et pour moitié par le Sénat[2]) et trois magistrats du siège à la Cour de cassation[3]. C'est l'un de ces derniers qui préside la Cour. Elle est assistée de magistrats du siège et du parquet issus de la Cour de cassation. Ces magistrats composent la commission des requêtes, la commission d'instruction et le ministère public.

Procédure

Siège de la Cour de Justice de la République

L'innovation de la révision constitutionnelle réside dans la saisine de cette cour, qui a été « déparlementarisée », et ouverte.

Originellement, lorsque la Haute Cour de Justice était chargée de juger le président ou des membres du gouvernement, seul le Parlement pouvait engager des poursuites. Or, la coïncidence politique entre la majorité parlementaire et le gouvernement rendait hypothétique la mise en jeu de la responsabilité pénale d'un ministre, au risque d'un déni de justice.

Depuis la création de la Cour de Justice de la République, les poursuites sont « déparlementarisées ».

L'initiative appartient à toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit commis par un membre du Gouvernement dans l'exercice de ses fonctions[4] et au procureur général de la Cour de cassation. Les victimes ne peuvent se constituer partie civile (article 13 de la loi organique n°93-1252 du 23 novembre 1993); CJR, 15 mai 2000, S. Royal), comme l'a regretté l'avocat de Ségolène Royal.

Les plaintes sont évaluées par une commission des requêtes, composée de magistrats de la Cour de cassation. Cette commission apprécie la recevabilité des plaintes, les classe sans suite ou les transmet au procureur général près la Cour de cassation, qui saisit la CJR.

Le procureur général près la Cour de cassation peut aussi la saisir d'office sur avis conforme de ladite commission.

Une commission d'instruction est chargée d'instruire le dossier, et clôture son instruction par une ordonnance de renvoi ou de non-lieu.

Après la clôture des débats, les membres de la CJR votent sur chaque chef d'accusation à la majorité absolue, par bulletins secrets. Puis, si l'accusé est déclaré coupable, ils votent sur l'application de la peine à infliger.

Son arrêt peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation. Si l'arrêt est cassé et que l'affaire est alors renvoyée devant la CJR, la Cour de justice doit être entièrement recomposée avant de rejuger l'affaire.

Arrêts rendus par la Cour

  • Dans son arrêt du 9 mars 1999, concernant l'Affaire du sang contaminé, la Cour de justice de la République, d'une part, déclare non-constitués, à la charge de Laurent Fabius (Premier ministre entre 1984 et 1986) et Georgina Dufoix (Ministre des Affaires sociales et de la Solidarité), les délits d'atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité physique des personnes et, d'autre part, déclare coupable Edmond Hervé (secrétaire d'État à la Santé) des délits d'atteintes involontaires à la vie de Mme M... et d'atteinte involontaire à l'intégrité physique de Mme R... Cependant, Edmond Hervé est dispensé de peine (en application de l'article 469-1 du code de procédure pénale) en raison du fait de n'avoir pas pu, pendant la longue affaire du sang contaminé, « bénéficier totalement de la présomption d'innocence et (avoir été) soumis, avant jugement, à des appréciations souvent excessives ».
  • Ségolène Royal a été poursuivie en diffamation par deux enseignants du lycée Thiers de Marseille. La Cour de justice (arrêt du 16 mai 2000), après avoir considéré que « le fait de reprocher à des enseignants, aisément identifiables, d'avoir permis la commission d'actes de bizutage est de nature à porter atteinte à leur honneur et à leur considération », estime que la ministre a toutefois rapporté « la preuve parfaite, complète et corrélative des faits qu'elle impute aux plaignants » et est donc relaxée.
  • Michel Gillibert, secrétaire d'État aux handicapés entre 1988 et 1993, a été condamné par la CJR (arrêt du 7 juillet 2004) pour escroquerie au préjudice de l'État (détournement de 1,3 million d'euros). Une peine de trois ans d'emprisonnement avec sursis, 20 000 euros d'amende et cinq ans d'inéligibilité et d'interdiction de vote a été prononcée.
  • Charles Pasqua a été renvoyé devant la CJR le 17 juillet 2009[5]. Trois chefs d'accusation sont émis contre l'ancien ministre de l'Intérieur : « complicité et recel d'abus de biens sociaux » dans le transfert du siège de GEC-Alstom ; « corruption passive par une personne dépositaire de l'autorité publique » dans l'affaire du casino d'Annemasse ; « complicité et recel d'abus de biens sociaux » dans le dossier de la Sofremi. Le procès a lieu en avril 2010 : 4 ans de prison sont requis, mais l'ancien ministre de l'Intérieur est relaxé pour les deux premières affaires et condamné à une année avec sursis dans celle de la Sofremi[6].

Annexes

Notes et références

  1. Parlementaires élus par l'Assemblée nationale sur son site, consulté le 26 avril 2010
  2. Parlementaires élus par le Sénat sur son site, consulté le 26 avril 2010
  3. Composition de la Cour de justice de la République sur le site de la Cour de Cassation, consulté le 26 avril 2010
  4. La Cour de cassation considère que « les actes commis par un ministre dans l'exercice de ses fonctions sont ceux qui ont un rapport direct avec la conduite des affaires de l'État relevant de ses attributions, à l'exclusion des comportements concernant la vie privée ou les mandats électifs locaux » (Crim., 26 juin 1995, A. Carignon, pourvoi n° 95-82333). La compétence de la Cour de justice de la République, telle que prévue par l'article 68-1 de la Constitution, « ne saurait s'étendre aux actes qui ne sont commis, par des ministres, qu'à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions » (Crim., 6 février 1997, M. Noir, pourvoi n° 96-80615).
  5. « Charles Pasqua sera le sixième ancien ministre jugé par la CJR », Le Nouvel Observateur, 17 juillet 2009.
  6. « Un an avec sursis et “deux relaxes de plus” pour Pasqua », L'Express, 30 avril 2010.

Liens internes

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