Canons de concordances

Canons de concordances

Les Canons de concordances sont un type de représentation (enluminure) que l’on trouve au début de différents manuscrits liturgiques médiévaux (bibles, évangéliaires, livres d’évangiles).

VIe siècle. Vatican, Bibliothèque Apostolique. Vat. Lat. 3806

Sommaire

Principe

Le principe des Canons de concordances consiste à mettre en relation les passages d’évangiles similaires d’un évangéliste à l’autre. Le lecteur du Nouveau Testament utilisait ces pages par nécessité, car il était impossible de retrouver autrement un épisode commun de la vie du Christ, par exemple chez saint Matthieu et saint Marc.

Représentation

Canons de l'évangile de Adysh (Géorgie)

Il s’agit quasi-systématiquement d’une série de colonnades et d’arcatures inscrites sous un vaste portique. Ce système de colonnades court sur plusieurs pages. À chaque colonne est associé un évangéliste (Matthieu, Marc, Luc et Jean) et chaque ligne de texte correspond aux références d’un même passage d’évangile.

Structure

  • Canons 1 : Extraits communs aux quatre évangiles
  • Canons 2 : Extraits communs à Mt, Mc, Lc
  • Canons 3 : Extraits communs à Mt, Lc et Jn
  • Canons 4 : Extraits communs à Mt, Mc et Jn
  • Canons 5 : Extraits communs à Mt et Lc
  • Canons 6 : Extraits communs à Mt et Mc
  • Canons 7 : Extraits communs à Mt et Jn
  • Canons 8 : Extraits communs à Mc et Lc
  • Canons 9 : Extraits communs à Lc et Jn
  • Canons 10 : Passages propres à chaque évangile dans l’ordre des évangélistes (Mt ; Mc ; Lc ; Jn)

Il manque les combinaisons « Mc, Lc et Jn » et « Lc et Jn » qui n’ont jamais été restituées[1].

Origines

La création du système

L’origine de cette représentation remonte à la fin de l’Empire romain, lorsque la Bible est traduite en latin. C’est en Orient que ce type de représentation est créé et qu’il se diffuse.

Ammonius d’Alexandrie (IIIe s. après J.-C.) invente un procédé qui consistait à reproduire intégralement les quatre textes dans quatre colonnes, en établissant des correspondances entre eux.

Au début du IVe s. après J.-C., Eusèbe, évêque de Césarée, trouve le moyen de mettre en relation les passages identiques d’un évangéliste à un autre sous la forme d’un tableau simplifié. Dans une lettre adressée à son ami Carpien, souvent reproduite parmi les textes préliminaires des évangiles, Eusèbe explique qu’il a divisé chaque texte en chapitres, puis il les a numérotés. Enfin il a établi entre eux des concordances en les classant en dix tableaux placés au début du volume.

Carl Nordenfalk (1938) est le premier à proposer une reconstitution du modèle conçu par Eusèbe. Les Canons se développaient en sept Tables précédées d’un prologue contenant, entre autres, la lettre d’Eusèbe à Carpien expliquant leur disposition.

Un manuscrit londonien conserve au folio 10 la dernière page de cette lettre. Son texte est encadré par des arcs identiques à ceux que l’on trouve dans les Canons qui la suivent. Au total, dix pages sont occupées par les concordances établies par Eusèbe, et la lettre explicative. C’est certainement ce premier modèle de lettre qui fut reproduit par la suite. En toute hypothèse, aucun ouvrage plus ancien et présentant cette lettre ne semble avoir été découvert.

La transmission par Eusèbe de Césarée

Après avoir fixé cette distribution (cf. plus haut « Structure »), Eusèbe envoie cinquante exemplaires copiés au scriptorium de Césarée à l’Empereur Constantin Ier. Ils constituent alors un modèle pour les manuscrits byzantins réalisés par la suite.

D’emblée la présentation des colonnes de chiffres s’effectue dans une structure composée d’arcades, de chapiteaux et de colonnes. Ce modèle aura persisté dans les Bibles, évangéliaires ou livres d’évangiles pendant plus de mille ans.

La diffusion en Occident

C’est par l’intermédiaire de saint Jérôme (vers 340 – 3 septembre 420) que l’usage a été adopté en Occident. En effet, il les ajouta dans son édition de la Vulgate et en donna une explication, en publiant en même temps la lettre d’Eusèbe à Carpien, ainsi que sa lettre au pape Damase.


Les Canons de concordances ne sont que brièvement évoqués dans les livres sur l’enluminure. Ils ont souvent été considérés comme des dessins sans originalité du fait de leur représentation répétitive.


Galerie

Références

  1. Bruce M. Metzger, Bart D. Ehrman: The Text of the New Testament: Its Transmission, Corruption, and Restoration. New York, Oxford: Oxford University Press, 2005, p. 38.

Sources et bibliographie

  • Ammonius d’Alexandrie, Harmonie évangélique, mi IIIe, traduction en Latin de Victor di Capua
  • CABROL Fernand, R. P. dom LECLERCQ Henri, Dictionnaire d’Archéologie Chrétienne et de Liturgie, Letouzey et Ané, Paris, 1924
  • BOINET Amédée, La miniature carolingienne, Picard, 1920
  • BOUTEMY André, La miniature, Paris, 1926
  • BOUTEMY André, Les manuscrits à miniatures (IXe - XIIe s.) à l’exposition Scaldis de Tournai
  • EBERSOLT Jean, Orient et Occident. Recherches sur les influences byzantines et orientales en France avant les croisades, Paris, Bruxelles, G. van Oest, 1963
  • Enluminure carolingienne et romane, Paris, 1976, dans Les dossiers de l’archéologie, n°14, janvier-février 1970
  • GARRIGOU Gilberte, Naissance et splendeurs du manuscrit monastique du VIIe au XIIe s., Noyon, 1992
  • NORDENFALK Carl, Die Spätantiken Kanontafeln, Kunstgeschichtliche Studien über die eusebianisches Evangelien-Konkordanz in der vier ersten Jahrhunderten ihrer Geschichte, Göteborg, 1938
  • NORDENFALK Carl, L’enluminure au Moyen Age, Skira, Genève, 1995 (réed.)
  • NORDENFALK Carl, GRABAR André, La peinture romane du XIe au XIIIe s.
  • NORDENFALK Carl, L’enluminure, dans Les grands siècles de la peinture. Le Haut Moyen Age du IVe au XIe s., A. Skira, 1957
  • Éric Palazzo, « L’illustration dans l’évangéliaire au Haut Moyen Age », dans La Maison-Dieu, 176, 1989, p. 67-80
  • Éric Palazzo, L’enluminure à Metz au Haut Moyen Age (VIIIe-XIe), Edition Serpenoise, 1989
  • ROMANINI Angiola Maria (dir.), Enciclopedia dell’arte medievale, Instituo della Enciclopedia Italiana, Rome, 1991
  • TOUBERT Hélène, « Formes et fonctions de l’enluminure », dans Histoire de l’édition française, t. 1 : Le livre conquérant, Paris, 1982, p. 87-129


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