Boudraâ Bel Abbès

Boudraâ Bel Abbès
Professeur Boudraa Belabbas
Professeur Boudraa Belabbas.
Professeur Boudraa Belabbas.

Naissance 28 avril 1925
Sidi Bel Abbès, Algérie
Décès 21 octobre 2011
Oran, Algérie
Nationalité Drapeau de l'Algérie Algérienne
Profession Chirurgien,
Cancérologue

Bel Abbès (Belabbas) Boudraâ, né le 28 avril 1925 à Sidi Bel Abbès, mort le vendredi 21 octobre 2011 à Oran à l'âge de 86 ans[1] est un médecin-chirurgien algérien, militant de la cause nationale algérienne, précurseur dans la lutte contre le cancer et considéré comme un des père de la chirurgie algérienne[2]. Il participera à la formation de toute une génération de chirurgiens algériens[3]. Il est reconnu pour son dévouement tant à son pays qu'à son métier et pour son humilité[4], préférant toujours taire ses exploits au profit de ses compagnons de lutte[3],[5]. Il a été maire d'Oran de 1963 à 1965 et refusera la députation en 1977[3].

Sommaire

Études

En Algérie

Le professeur Boudraâ Belabbas (Belabbas est son prénom d'état civil) mais connu également sous le surnom « Abbès », est né le 28 avril 1925 à Sidi Bel Abbès, il est issu d’une famille nombreuse et modeste. Sa famille s’installe à Oran, alors qu’il est encore enfant.

Son père, Si Othmane, l’éduque dans le respect d’un islam tolérant, moderne, en symbiose avec l’universalité, mais aussi dans l’amour de la patrie et celui des humbles. Le jeune Belabbas fréquente alors, parallèlement à l’école primaire, la Médersa El Falah à El Medina El Djadida fondée par les islahistes[6],[3].

Après des études primaires à l'école Paixhans, il réussit en 1939, son certificat d'études ce qui était pour la majorité des algériens, très difficile à l'époque de la colonisation[3].

Boudraa Belabbas s'inscrit ensuite en études secondaires au lycée Lamoricière où les "algériens" constituaient une infime minorité. Il obtient son baccalauréat philosophique en 1945.

Il tente dans un premier temps d'entamer des études de médecine à la faculté d'Alger. Mais l’environnement colonial était hostile aux « indigènes » et leur accès aux études supérieures n'était toléré que difficilement[6],[3],[7]. Boudraa Bel Abbès se loge alors dans un wagon-lit à la gare d'Alger. Il vécut alors une année de disette[6],[3],[7].

En France

équipe de football, le professeur Boudraa est en haut au centre

Loin de renoncer à son rêve de devenir médecin, il décide de partir effectuer ses études à la faculté de médecine de Poitiers en 1947[3]. Pour financer ses études, il reçoit l'aide d'une association caritative de Tlemcen, ainsi qu'un prêt d'honneur et l'aide de son frère Abdelkader. Il effectue également des petits emplois au CROUS et il devient suppléant en éducation physique et sportive dans un centre de formation professionnelle. Il signe une licence de football au club professionnel local.Il rencontre maître Belabbas, qui est également issu d'un milieu pauvre. Tout comme Boudraa, il décroche son diplôme (d'avocat). Une amitié naît entre les deux hommes, qui sera consolidée par leur engagement dans la guerre de libération nationale une dizaine d'années plus tard.

De 1953 à 1954, il devient interne en chirurgie au centre hospitalier de Châtellerault, puis au centre hospitalier régional de Vannes en 1955. En 1956, à Paris, il réussit l'examen de clinicat de fin d'études de médecine. Il termine une thèse sur une épidémie de variole survenue à Vannes[7].

Mais à la veille de la soutenance de sa thèse de doctorat (1956), il doit opérer un choix entre sa carrière et son pays : il décide d'abandonner l'université pour rejoindre l'armée de libération nationale et « monter au maquis ». Mais le docteur Laliam, rencontré à Relizane lui conseille de se rendre en Tunisie où il serait plus utile. Il est affecté alors dans les services de santé.

Rôle durant la lutte pour la libération nationale

Les anciens médecins de l'ALN, le professeur Boudraa est à droite

Durant ses études, il reste imprégné par la culture arabo-islamique grâce à l'école d'El-Islah à Oran et grâce à l'enseignement de ses maîtres à penser, le cheikh Mohammed Brahim El-Miloud, Mehadji Maoui, Souiah Houari et les enseignants Mohammed Belhalfaoui, Benali Seghier, Mohammed Benahmed, Abdelkader Kettaf...

Il prend très tôt conscience de l'injustice qui régnait à l'époque de l'Algérie coloniale au même titre que beaucoup d'étudiants Algériens qui vont rejoindre la lutte de libération nationale.

En Tunisie : soigner les victimes de la guerre et des bombardements de Sakiet Sidi Youssef

Déjà marié et père de famille, il se retrouve en 1956 dans la base de l'est sur la frontière tunisienne[3],[6],[2]. Sous les ordres du docteur Nekkache, il prodigue des soins de chirurgie aux combattants de l'armée de libération nationale, aux réfugiés algériens, à la population tunisienne, et à deux prisonniers français blessés par balles. C'est lui, selon des témoignages concordants[3],[2], qui s'est chargé des blessés des bombardements par l'aviation française de Sakiet Sidi Youssef[3],[6]. Il se consacre aux soins des soldats et à une population civile paupérisée par l’exode. Il se lance également dans la formation des infirmiers et infirmières de l’ALN.

Il est alors successivement interne au centre hospitalier de Le Kef (Tunisie-1956-1958), interne à l’hôpital Saddiki de Tunis chez un chirurgien algérien, le professeur Haddam (Algérie-1958) et ensuite interne à l'Hôpital Charles-Nicolle à Tunis, chez le professeur Essafi (Algérie-1960-1961) et enfin chef de service de chirurgie générale à Souk Elarba de 1961 à 1962.

Il participe à la libération de l'Algérie en prodiguant des soins aux combattants en tant que chirurgien de l'armée de libération nationale. Il rencontre Belkacem Krim (qui lui envoya une lettre de remerciement pour ses soins), Rabah Bitat et Zeddour Mohamed Brahim Kacem, qui fut assassiné par la DST (Direction de la surveillance du territoire).

De retour en Algérie : les victimes de l'O.A.S.

En 1962, il vient au secours des victimes du terrorisme de l'Organisation armée secrète alors que sa famille (sa femme et ses cinq enfants) est à Tanger au Maroc[3].

A Oran-Ville, à l’écrasante majorité pieds-noirs, l'OAS va commettre de nombreux assassinats[8] (voiture piégée, assassinats ciblés ou de masse... ), n’épargnant ni femme (exemple : le 11 mai où 15 femmes de ménage furent abattues au révolver ou au poignard[8]), ni enfant, ni vieillard, allant jusqu’à l’assassinat dans leur lit des Algériennes et Algériens à l’hôpital. Les Algériens minoritaires et ghettoïsés dans leurs quartiers sont tout simplement privés de soins et, particulièrement, de tout traitement chirurgical[6]. Du 19 mars au 1erer juillet 1962 on dénombra à Oran comme victimes de l’OAS : 66 Européens civils tués et 36 blessés ; 410 Algériens tués et 487 blessés[8]).

La zone autonome d’Oran décide alors d’ouvrir une antenne médico-chirurgicale, rue Tombouctou à El Medina El Djedida. Le professeur Boudraa Belabbas en prend la responsabilité. Selon des témoins de cette période, son grand humanisme n’aura pas été altéré par les affres de la guerre, sauvant aussi de nombreuses vie humaines dont de nombreux pieds-noirs[6].

En tant que chirurgien, il est appelé à accomplir plusieurs missions et passer d'est en ouest[3]. Il fournira également au mouvement la pyramide des cellules de recrutement et d'étanchéité pour les militants suite à une réunion initiée secrètement par Zeddour Ibrahim El-Kacem en présence de Belaroussi Caïd Abdelkader, Guermaz Abdelkader et Benarba Mohammed[7].

Une fois la paix revenue, le professeur Boudraa Belabbas devient le premier médecin "indigène" à franchir[3],[6],[2], le 1er juillet 1962, les grilles de l’hôpital d’Oran pour le remettre en marche après le départ massif des médecins français. Il rejoint le pavillon 10 qu’il baptise du nom du martyr, le docteur Aït Idir Ali.

Au moment où certains s'accaparent les demeures vacantes après le départ précipité des pieds-noirs,[réf. nécessaire] il s'installe dans un appartement d'astreinte au sein de son lieu de travail avec sa femme et ses sept enfants[3],[6].

Engagement pour faire progresser son pays

En politique

Il devient président de la délégation spéciale de la mairie d'Oran le 18 juin 1963[7]. Durant sa carrière politique, il se distingue d'après ses pairs par sa modestie et son humilité [3],[6].

On lui attribue aujourd'hui :

  • les premières tentatives de restructuration de l’administration municipale.
  • la réalisation du collecteur des eaux usées allant du siège de la seconde région militaire, à la sortie ouest d’Oran, jusqu’au port en passant par le boulevard Stalingrad à Sidi El Houari. Ce projet a permis l’embauche de centaines de désœuvrés.
  • l'organisation de la première quinzaine économique de la ville d’Oran, d'après certains cadres retraités de l’APC[9].

On raconte qu’il a même balayé les rues avec les travailleurs des services de la voirie[9].

Il démissionne le 18 juin 1965 pour un problème de principe apolitique[7], à la suite du coup d'état[2].[pas clair]

De 1969 à 1974, il est élu président de la première Assemblée populaire de wilaya (APW) d'Oran[7] dont le Code de Wilaya est à réformer.

Il refusera la députation en 1977 au temps du parti unique pour se consacrer pleinement aux malades et à la formation de plusieurs générations de médecins et de chirurgiens.

Sa devise était : "Bien gérer et non digérer, Unir et non désunir, Servir et non se servir"[7],[6],[2].

En médecine : un des pères fondateurs de la chirurgie à Oran

En juillet 1963, parallèlement à sa carrière politique, il soutient sa thèse de doctorat en médecine à Alger[7].

Il entame alors sa carrière de chef de service du Pavillon 10 de la clinique Ait Idir Ali du CHU d'Oran[7]. Il y deviendra un des pionniers de la faculté de médecine d'Oran et de l'école de chirurgie algérienne. Il relancera l’activité de la formation médicale et paramédicale, notamment des accoucheuses rurales..

En octobre 1963 éclate le conflit algéro-marocain. Il se retrouve alors au front à la tête de l’équipe chirurgicale.

Il suit une formation en cancérologie à Göteborg en Suède, puis à Lyon en 1967, puis à Paris à l'Hôpital Paul-Brousse. Dès son arrivée à l’hôpital d'Oran, il prendra la mesure du désarroi des malades cancéreux[6] et de la nécessité d’une prise en charge multidisciplinaire. Il proposera, pour le traitement du cancer, le maintien de l'unité du lieu avec extension de la structure ainsi qu'un plan d'aménagement, en particulier l'installation de la curiethérapie et de la médecine nucléaire[10]. Il se battra pour faire aboutir son projet, allant jusqu’à la grève de la faim[7],[6]. Malheureusement, il ne sera pas écouté par les décideurs mais il reste considéré comme un des pionnier dans la lutte contre le cancer dans son pays[6],[2].

De 1969 à 1970, il est nommé au poste de doyen de l'école de médecine d'Oran. Il fait construire l'institut des sciences médicales (ISM) d'Oran[3],[6]. Il démissionnera suite à un désaccord sur la démagogie[7].[pas clair]

De 1984 à 1985, il est élu à l'unanimité président du Conseil Médical. C'est lui qui se chargera de la formation de toute une génération de chirurgiens, dont certains exercent jusqu'aujourd'hui.

Respect et reconnaissance

Le Professeur Boudraa au centre lors d'une commémoration

Il part à la retraite en 1994, alors âgé de 70 ans[2].

Le 8 mai 2006, une cérémonie a été organisée par le service cancérologique « pavillon 10 ». Durant cette cérémonie, le docteur Lezrag, professeur d'ophtalmologie, a inauguré un auditorium, baptisé du nom de Boudraa Belabbès[10].

Ses pairs encore en vie ou ses anciens étudiants en poste ou installés lui témoignent aujourd'hui beaucoup d'égards. Il fut régulièrement invité aux commémorations marquantes[11] et aux séances d'ouverture des rencontres et congrès médicaux. Il est reconnu comme un précurseur dans la lutte contre le cancer[3],[6],[2]. Il s'est éteint le 21 octobre 2011 à l'âge de 86 ans.,[2] Il est enterré au carré des martyrs du cimetière de Aïn-Beïda d’Oran[1].

Références

  1. a et b Décès du moudjahid Belabbes Boudraa, le défunt inhumé au carré des martyrs à Oran, 'Algérie Presse Service.
  2. a, b, c, d, e, f, g, h, i et j Disparition du Pr Boudrâa : L’un des pères de la médecine algérienne s’en va, Publié sur El Watan, écrit par Akram El Kébir.
  3. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, l, m, n, o, p, q et r Un lieu, un nom: Le Professeur Boudraa Belabbès : l'homme des choix douloureux, Ziad Salah, journal Le Quotidien Oran.
  4. Boudraa Bel abbès, médecin chirurgien distingué par sa modestie et son humilité
  5. le professeur Boudraa Belabbes, le militant discret de la cause nationale El Watan, mardi 5 janvier 2010
  6. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, l, m, n, o et p Hommage au professeur Boudraâ Belabbès, Journal El Watan
  7. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k et l , Curriculum Vitae du professeur Bourdaa Bel Abbes
  8. a, b et c les victimes de l’OAS à Oran en 1962, article de la rubrique les deux rives de la Méditerranée, Oran 1962, date de publication : lundi 29 janvier 2007
  9. a et b Oran, mémoire citadine
  10. a et b Inauguration de l'auditorium « Boudraa Belabbès », El Watan : 09 - 05 - 2006.
  11. , El Wahtan, 4 mai 2008, les professeurs Mourad Taleb, Boudraâ et Kandil honorés, « Un vif hommage a été rendu au Pr Boudraa, âgé de 81 ans et qui a été invité à cette rencontre, représentant un symbole de la médecine par son travail et ses sacrifices pour remettre la Santé sur pied après le départ des colons »

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Boudraâ Bel Abbès de Wikipédia en français (auteurs)

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