Évangile de Judas

Évangile de Judas

L'Évangile de Judas est un des Évangiles apocryphes (c’est-à-dire non reconnu par les Églises) du IIe siècle, dont il n’existe qu’une version en mauvais état du IIIe siècle (les pages 33 à 58 du Codex Tchacos) déposée à la Fondation Martin Bodmer à Genève.

Sommaire

Histoire

Cet évangile a été composé dans la première moitié du IIe siècle et pourrait être une traduction copte d'un texte grec encore plus ancien. Irénée de Lyon, évêque de Lyon, fait mention d'un évangile de Judas à la fin du IIe siècle dans son ouvrage Contre les hérésies (livre 1, chapitre 31, alinéa 1) : l'Évangile de Judas y est attribué à la secte gnostique des Caïnites.

L’Évangile de Judas est un manuscrit en papyrus de 26 pages écrit en sahidique (copte dialectal), datant du IIIe siècle ou du IVe siècle (entre 220 et 340 après J.-C.). Il fait partie d'un codex d'une soixantaine de feuillets (entre 62 et 66 suivant les sources) appelé « Codex Tchacos », contenant aussi deux autres textes apocryphes : l'Épître de Pierre à Philippe et la Première Apocalypse de Jacques, qui se trouvent aussi dans les manuscrits de Nag Hammadi. Ce codex a été vraisemblablement découvert en 1978, dans les sables du désert égyptien près de Al Minya.

Le manuscrit demeura dans un coffre-fort de la Citybank de Long Island, près de New York, aux États-Unis pendant plus de seize ans, ce qui en détériora l'état de conservation. Il fut ensuite acquis par une fondation suisse en 2001, la Fondation Maecenas pour l'art ancien, qui le restaura, le traduisit et procéda à divers tests d'authentification, dont la datation au carbone 14.

L'Évangile de Judas a été publié en 2006 par la National Geographic Society et l'original exposé à Washington. Il était prévu que l'original devait être offert au gouvernement égyptien et déposé au Musée copte du Caire. Le codex cependant, toujours en cours de restauration et d'assemblage (des fragments ayant été volés avant l'achat), se trouve actuellement à Genève à la Fondation Martin Bodmer. En effet, selon Rodolphe Kasser, le codex contenait à l'origine 31 pages recto-verso ; cependant, lorsqu'il apparut sur le marché en 1999, seules 13 pages subsistaient.

Le lancement du texte intégral, à Pâques 2006, a été accompagné par des ouvrages grand public racontant l'histoire de la découverte de l'œuvre.

Contenu

Selon l'hypothèse émise par l'équipe éditoriale du National Geographic, et largement reprise par les médias, le texte présenterait une interprétation originale de la trahison de Jésus par Judas, un de ses apôtres : tu les surpasseras tous, car tu sacrifieras l’homme qui me sert d’enveloppe charnelle. En dénonçant Jésus, il aurait été le seul de ses disciples à avoir vraiment compris le message qu’il voulait véhiculer. Disciple bien aimé de Jésus, il aurait eu la plus difficile des missions à accomplir : le livrer aux Romains. En agissant ainsi, il aurait donc suivi une demande de ce dernier, qui lui permit de faire le sacrifice ultime pour la rédemption du monde.

Cette thèse de l'équipe éditoriale du National Geographic ne trouve aucun appui dans le texte et elle est actuellement fortement critiquée par la communauté scientifique. À ce sujet, s'est tenu un congrès international à l'Université Rice de Houston du 13 au 16 mars 2008[1]. La majorité des participants à ce congrès, dont certains membres de l'équipe éditoriale du National Geographic, ont souligné que la figure de Judas n'avait rien de positif dans l'Évangile de Judas. Il y est plutôt présenté comme étant un être sous l'emprise de son destin et sous l'emprise des astres (45, 13). Il est qualifié de « treizième daimon » (44, 20), de « treizième » (46, 20) et il est celui qui gouvernera sur ceux qui le maudissent (46, 21-23). Ce gouvernement de Judas s'exercera par l'entremise de son étoile (ou de son astre) sur le treizième éon (55, 10-11). C'est cet aveuglement de Judas qui le poussera à commettre le sacrifice le plus vil qui soit : Sacrifier l'enveloppe charnelle de son maître et l'offrir au dieu Saklas.

L'équipe du National Geographic et les médias ont insisté sur le fait qu'il est dit à la fin de l'Évangile de Judas qu'il surpassera les autres. Or, le contexte immédiat indique que ceux que Judas surpassera ne sont pas ceux qui suivent Jésus, mais plutôt ceux qui présentent et offrent des sacrifices au dieu Saklas (56, 12-13). On consultera à profit le livre d'April DeConick, professeur à l'Université Rice, ainsi que les articles de Louis Painchaud et d'André Gagné publiés dans la revue Laval théologique et philosophique.

Chez les anciens, on peut noter le jugement d'Épiphane de Salamine qui, dans son Panarion (1,31), affirme que cet évangile fait partie des écritures de la secte gnostique des Caïnites. Il réagit à l'apologie que cet écrit fait de Judas en s'appuyant sur le texte des évangiles canoniques, eux-mêmes fondés sur une lecture prophétique de l'Ancien Testament. Or certains gnostiques avaient précisément comme règle herméneutique de détacher le Nouveau Testament de ses racines juives. C'est peut-être le cas de l'Évangile de Judas : en justifiant Judas, ils mettent à mal tout ce que les chrétiens ont compris du drame de l'apôtre à partir de leur méditation des livres prophétiques et des Psaumes.

Voir aussi

Notes et références

Bibliographie

Liens internes

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Évangile de Judas de Wikipédia en français (auteurs)

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