René Hardy

René Hardy
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René Hardy, né le 31 octobre 1911 à Mortrée (Orne) et mort le 12 avril 1987 à Melle (Deux-Sèvres), est un résistant et écrivain français, cadre à la SNCF, célèbre pour avoir été soupçonné d'être responsable de l'arrestation en 1943 de huit membres importants de la Résistance, dont Jean Moulin.

Sommaire

Action dans la Résistance

Appartenant au groupe de résistance Combat, René Hardy était depuis avril 1943 chargé des sabotages des voies ferrées au titre du 3e Bureau de l'Armée secrète. Sous les noms de guerre de "Bardot" et « Didot », il prépare en tant que technicien de la SNCF, avec Max Heilbron, un plan de sabotage des trains dans la région Sud.

Hardy est arrêté par Robert Moog, agent français de l'Abwehr, le 7 juin 1943, vers minuit, dans le train Lyon-Paris. Ramené le 10 à Lyon par Klaus Barbie, chef du service SD IV de la Gestapo de Lyon, il est interrogé par ce même Barbie, qui le relâche vers 1 h du matin, le 11, sans savoir que Hardy est le "Didot" qu'il pourchasse intensément depuis des mois. Mais, au petit matin, un télégramme du SD de Paris donnant le signalement précis de Didot arrive au bureau de Barbie, qui permet à celui-ci de comprendre sa magistrale bourde : Hardy est Didot. Relançant la chasse à l'homme, Barbie reprend Hardy-Didot, à Lyon, sans doute le 12 en fin d'après-midi, à la gare[réf. nécessaire].

Arrestation du 21 juin 1943

Le 21 juin, convoqués par Jean Moulin suite à l'arrestation à Paris, le 9 juin, du général Charles Delestraint[1], chef de l'Armée secrète, les dirigeants de l'Armée secrète se réunissent chez le docteur Frédéric Dugoujon, à Caluire-et-Cuire, dans la banlieue de Lyon : Jean Moulin, André Lassagne, Raymond Aubrac, Henri Aubry, Bruno Larat, le colonel Emile Schwarzfeld et le colonel Albert Lacaze. La rencontre est camouflée en consultations médicales. Moulin a laissé à Lassagne le soin d'organiser la rencontre.

Sur ordre de Pierre de Bénouville[2], appuyé par Claude Bourdet et Jacques Baumel, tous de Combat, Henri Aubry, lui aussi de Combat, qui avait un temps fait fonction de chef d'état-major de l'Armée secrète, convainc Hardy, qui ne voulait pas aller à la réunion, de s'y rendre avec lui. Il s'agira pour eux de protester, voire de s'opposer aux dernières décisions de Jean Moulin qui vient de priver Combat, à l'origine de l'Armée secrète, de son influence prépondérante à la direction de celle-ci, et ce au profit de Libération-Sud.

La Gestapo surprend la réunion et arrête les huit participants, ainsi que le médecin et ses patientes. Hardy, quant à lui, parvient à s'échapper. Selon certains témoins oculaires, les policiers le laissent s'enfuir[réf. nécessaire]. Selon plusieurs autres, il est atteint par une balle allemande qui lui brise un bras[réf. nécessaire]. Mais s'il échappe alors à la Gestapo, elle le reprend quelques jours plus tard et le détient dans un hôpital militaire allemand[réf. nécessaire], d'où, dit-on[Qui ?], il s'échappera finalement en août.

Des personnes appréhendées ce jour-là, certaines ont été libérées après procès ou relâchées simplement : Aubry (après avoir été torturé et avoir révélé le pseudonyme de Moulin, le 13 décembre 1943), Lacaze et Dougoujon (sur non-lieu après procès, le 17 janvier 1944). Toutes ont apparemment subi des interrogatoires et la torture qui l'accompagnait. Moulin, Lassagne, Larat et Schwarzfeld partiront en déportation, seul Lassagne en reviendra. Aubrac s'évadera à l'aide de sa femme Lucie.

Procès

Accusé de la responsabilité de cette arrestation, Hardy est arrêté après la Libération, le 12 décembre 1944. Faute de preuves, il est acquitté lors de son procès, en janvier 1947[1], par la cour de justice de la Seine.

Roger Wybot, patron de la DST, découvre alors que Hardy a menti sur le fait qu'il avait été arrêté par la Gestapo peu avant les faits[1]. De nouveau arrêté le 24 mars suivant, il est acquitté derechef au bénéfice du doute, le 8 mai 1950, cette fois par le tribunal militaire, mais de justesse : jugé coupable avec une voix de majorité, alors qu'il en faut deux pour être condamné. À chaque fois, il est défendu par l'avocat Maurice Garçon[3].

Controverse sur sa responsabilité

Malgré son double acquittement, la responsabilité de Hardy dans la trahison de Caluire reste soumise à controverse, de nombreuses personnalités impliquées ou non dans l'affaire ayant émis des témoignages ou des analyses contradictoires, sur divers éléments du dossier.

Arrestation de Deslestraint

Certains[Qui ?] croient qu'il fut libéré en récompense de sa trahison, et rappellent qu'il avait été le seul à n'avoir pas à la dernière minute participé à la rencontre secrète du 9 juin à Paris, au cours de laquelle le général Charles Delestraint, chef de l'Armée secrète, fut arrêté par la Gestapo. Mais si Hardy n'a en effet pas rencontré le général Delestraint à Paris le 9 juin, c'est qu'il était détenu depuis la nuit du 7 au 8 et, de surcroît, qu'il ignorait avoir ce rendez-vous avec le général Delestraint, étant parti pour Paris pour une autre raison[réf. nécessaire]. Par ailleurs, Delestraint a été arrêté dans le métro bien avant la réunion[réf. nécessaire].

Les précisions sur le lieu et la date de la rencontre avec le général Delestraint avaient été livrées non codées, comme d'habitude à cette époque, dans une boîte postale morte que la Gestapo connaissait et surveillait. Selon la sœur de Jean Moulin notamment, Hardy, arrêté le 7 juin, aurait été libéré le 11 par Klaus Barbie qui voulait jouer avec lui au jeu du chat et de la souris. D'autres[Qui ?] pensent que René Hardy était simplement trop négligeant. Mais s'il est certain que "Didot" était intensivement recherché par la Gestapo, il est non moins établi que Barbie ignorait son identité réelle jusqu'au 11 juin.

Les rapports allemands

D'après le rapport «Flora», rédigé le 19 juillet 1943 par Ernst Dunker et retrouvé en septembre 1944 à la Gestapo de Marseille, il est écrit que Didot a été arrêté le 9 juin 1943 à Paris par le Einsatz Kommando de Lyon. Ce même rapport stipule que Didot est alors agent double[4].

Le rapport Kaltenbrunner, daté du 29 juin 1943 et destiné à Joachim von Ribbentrop est retrouvé dans les archives du ministère des Affaires étrangères du Reich, à Berlin le 10 octobre 1946 ; celui-ci atteste que Hardy a bien joué un rôle dans l'arrestation dans la maison du docteur Dugoujon [5].

Déclaration de Klaus Barbie

Certains reprennent les dires de Barbie : Hardy se serait, dès le 10 juin, déclaré prêt à collaborer avec Barbie[réf. nécessaire]. On[Qui ?] a pu aussi avancer que Hardy connaissait Moulin pour l'avoir rencontré à Paris. Moulin, au courant depuis le 12 juin de l'arrestation de Hardy du 7 juin aurait, selon un témoignage unique et jamais recoupé, recommandé à tous d'éviter toute rencontre avec Hardy[réf. nécessaire].

Lors de son procès à Lyon, en 1987, Barbie n'eut pas l'occasion de dire si oui ou non Hardy avait travaillé pour lui comme agent double. Son procès portait seulement sur ses crimes contre l'humanité, pas sur ses actions contre la Résistance[réf. nécessaire]. Une instruction à ce sujet, ouverte avant le début du procès et refermée par un non-lieu sitôt le procès fini, interdisait d'en parler[réf. nécessaire].

Il est à noter qu'à plusieurs reprises, des contre-espions allemands ont accusé tel ou tel résistant d'avoir travaillé à leur profit[réf. nécessaire], procédé classique qui, employé en Algérie par le 11e Choc, provoquera la "bleuite" du FLN. Roland Nosek (chef du SD-Ausland de Paris) a notamment mis en cause Marie-Madeleine Fourcade[réf. nécessaire].

Hardy mourut peu de temps avant le procès Barbie, sans qu'une nouvelle accusation eût été portée contre lui.

Opinion des anciens chefs de Combat

Si les mémoires de Baumel et de Bourdet désignent Henri Aubry comme le responsable de la dénonciation, Henri Frenay et Maurice Chevance, dans les leurs, soulignent les mensonges répétés de René Hardy.

Lydie Bastien

Selon le journaliste Pierre Péan[6] rapportant sans vérification[réf. nécessaire] les propos de Victor Conté, l'exécuteur testamentaire de Lydie Bastien, ex-maitresse de René Hardy, celle-ci aurait été l'amante de Harry Stengritt, adjoint de Klaus Barbie, et aurait été chargée de séduire René Hardy, qui lui aurait confié des secrets en violation de toutes les consignes de sécurité[1]. Stengritt, arrêté en 1945 et condamné à 15 ans de prison en France, n'a jamais confirmé dans ses interrogatoires sa relation avec Lydie Bastien, ni sa manipulation de René Hardy pour le compte de la Gestapo.

L'écrivain

Après la guerre, Hardy devient un écrivain à succès :

  • Amère Victoire pour lequel il obtient le prix des Deux-Magots en 1956
  • Sentinelle perdue
  • La frontière passe à Muratoli
  • L'aigle et le cheval
  • Ce n'était pas le moment d'avoir vingt ans
  • La route des cygnes
  • Le livre de la colère (1951)
  • Le bois des amants (1960, en tant que scénariste)
  • Derniers mots (1984)
  • Gautier sans amour (1981)

Bibliographie

Filmographie

Deux téléfilms, diffusés par TF1 et France 2[7] sur la vie et la mort de Jean Moulin décrivent René Hardy comme un collaborateur de la Gestapo, ce qui a ranimé la controverse. La famille de Hardy a déclaré porter plainte contre les producteurs du film[Lequel ?].

Notes et références

  1. a, b, c et d Éric Conan, « C'est elle qui a fait arrêter Jean Moulin », dans L'Express, 3 juin 1999.
  2. Pierre Péan, Les liaisons dangereuses de Bénouville, l’Express, 19 novembre 1998.
  3. Interview de Pierre Péan par Pascale Froment et Laurent Joffrin: La « diabolique » qui a fait tomber Jean Moulin, dans Le Nouvel Observateur, 3 juin 1999.
  4. René Hardy sur memorialjeanmoulin-caluire.fr. Consulté le 21 aout 2011
  5. François Delpla, « Aubrac, les faits et la calomnie (suite) » sur delpla.org. Consulté le 21 aout 2011
  6. Pierre Péan, La Diabolique de Caluire (Fayard).
  7. Jean Moulin, téléfilm biographique réalisé par Yves Boisset en 2002 ; Jean Moulin, une affaire française, téléfilm de Pierre Aknine réalisé en 2003.

Voir aussi


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article René Hardy de Wikipédia en français (auteurs)

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