Portion congrue

Portion congrue

Dans de nombreuses paroisses de France sous l'Ancien Régime, la dîme n'est pas perçue directement par le curé mais par de "gros décimateurs" appelés curé primitif : ceux-ci reversent au curé desservant une partie de cette dîme appelée la portion congrue, qui comme son nom l'indique, à l'origine, doit permettre au prêtre de vivre convenablement.

Dans le langage courant, portion congrue signifie très petite part, avec souvent l'idée que quelqu'un d'autre a pris la plus grande partie. « [Les plats] étaient maigrement servis, ils sentaient la portion congrue » (Balzac, Un début dans la vie). «Me réserveraient-ils la portion congrue ? / Ouais ! moi, vieil épervier, faire le pied de grue ? / Non ! je veux mériter aussi les dons du roi» (Hugo, Cromwell).

Historique

Le montant de cette portion congrue a évolué. Un édit royal d'avril 1571, la fixe à 120 livres ; une déclaration royale de décembre 1634 alloue 200 livres aux curés sans vicaire et 300 livres aux autres. En mai 1768, à conditions de renoncer à d'autres taxes, les curés reçoivent 500 livres et les vicaires 200. Les parlements refusent d'enregistrer l'édit en arguant de la faiblesse de la portion congrue au regard des dépenses normales d'un curé (alimentation, habillement, domestique, cheval). En septembre 1786, le roi octroie 700 livres aux curés et 350 aux vicaires. L'édit ne fut pas appliqué en Bretagne où il ne fut enregistré qu'en mars 1789 par le parlement! À cette occasion, trouvant la charge trop lourde, de nombreux "gros décimateurs" abandonnèrent leurs dîmes aux desservants.

L'augmentation au XVIIIe siècle ne compense qu'imparfaitement l'augmentation des prix. Les cahiers de doléances du tiers état de 1789 demandent que la portion congrue soit portée à 1200 livres. L'animosité entre le "curé primitif" (haut-clergé) et les prêtres desservants (bas-clergé) favorisa la scission de l'ordre du clergé dans les premiers mois de la Révolution de 1789 et le ralliement du bas-clergé au tiers état, participant ainsi à l'effondrement de l'Ancien Régime et de la Monarchie absolue ainsi que les privilèges accordée au haut-clergé et à la noblesse.

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