Pierre Gaspard Chaumette

Pierre-Gaspard Chaumette

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Pierre-Gaspard Chaumette

Pierre-Gaspard Chaumette dit Anaxagoras, né à Nevers (Nièvre), le 24 mai 1763 et mort à Paris, le 13 avril 1794, est un membre de la Commune de Paris. Les Girondins Louvet^[1] ou Dulaure^[2], puis les Robespierristes, comme Arthur, laissent entendre qu'il fut un acteur du trouble et de l'exagération révolutionnaires suscités par le cabinet britannique.

Biographie

Fils d'un maître cordonnier de Nevers, Chaumette était un homme cultivé, issu de la bourgeoisie. Il alla étudier la médecine en Angleterre où il obtint un diplôme en septembre 1786. il fut l'élève du docteur Tluck, praticien qui exerçait à l'hôpital de la Charité à Londres. Parfaitement bilingue, Chaumette se fit de nombreux amis en Angleterre dont Thomas Christie avec lequel il vint à Paris en 1789. Or cet agent anglais radical avait été chargé par son gouvernement d'une mission très importante qui donne consistance aux manœuvres diligentées par la cour de Londres qui avaient contribué aux émeutes du mois d'octobre 1789. Neveu du Dr Price et correspondant d’Edmund Burke, Thomas Christie, Écossais d'origine, fut en effet chargé du recouvrement d'achats massifs de grains pour l'Angleterre auprès de la municipalité de Paris, ce qui, à l'époque, avait entraîné une pénurie susceptible de provoquer des émeutes^[3].

La journée du 6 octobre 1789 fut très probablement en rapport avec cette manœuvre, pour laquelle Christie acquitta le « paiement des grains et farines que la maison (Tunrbull et Forbes) avait acheté pour compte, et par ordre de la municipalité de Paris en septembre 1789. » Les fonds qui financèrent ces achats avaient transité par la banque du ministère anglais bien connu, la célèbre banque Turnbull et Forbes, qui finança nombre d'opération d'espionnage sur le continent, de la Révolution à l'Empire^[4].

Les relations de Chaumette avec un agent aussi important que Thomas Christie - que le patiote Thomas Paine dénonça vainement à la Convention - donnent à penser que les accusations de « complot » qui l'envoyèrent à l'échafaud n'étaient pas absolument infondées^[5]. Les historiens Buchez et Roux parlent d'ailleurs des "grosses sommes d'argent" qu'il a fait parvenir à son père, sommes d'argent "attribuées à la générosité de Pitt"^[6].

A Paris, Chaumette a travaillé comme Marat auquel il est souvent associé, dans le sens de la provocation et de l'agitation. Il a pour sa part collaboré au journal intitulé les Révolutions de Paris, et après le 10 août 1792, il fut nommé en, à la demande de Jean-Nicolas Pache, procureur syndic de la Commune. Il fut, avec Hébert, son substitut, à la tête d'une faction dite des « exagérés ». Il proposa et prit de nombreuses mesures sociales (interdiction de fouetter les enfants dans les écoles - il était connu pour s'intéresser aux jeunes garçons^[7] et s'intéressait à la prostitution^[8] - et de façon ostensible aux défavorisés, ce qui lui donna une sorte de popularité. Il fut surtout un zélateur des sévérités prétendument nécessaires (massacres de septembre, dénonciations, loi des suspect, armée révolutionnaire lancée contre la Convention, guillotine mobile, etc.) qui contribuèrent à noircir profondément la Révolution et ses aspirations nées des Lumières.

Profondément misogyne, il s'est publiquement félicité de l'exécution de Manon Roland et d'Olympe de Gouges, au prétexte qu'elles auraient oublié les devoirs qui conviennent à leur sexe. S'adressant aux citoyennes de Paris, il ajoutait à leur sujet: « Et vous voudriez les imiter ? Non, vous ne serez vraiment dignes d'estime qu'en vous efforçant d'être ce que la Nature a voulu que vous fussiez. Nous voulons que les femmes se respectent, c'est pourquoi nous les forcerons à se respecter elles-mêmes ^[9]. »

Quand le vent tourna pour les étrangers soupçonnés de fomenter des troubles et que fut rendue la loi contre eux, le président Montané fit un témoignage indirect contre Chaumette : « J'ai ouïe dire, » écrivait-il, que Stone^[10] « était avec un Anglais nommé Christie qui était très lié avec Chaumette, et que ce dernier le fit partir pour Londres deux heures avant le décret contre les étrangers ne fût rendu. » Christie avait été arrêté le 2 août et libéré le 7. Il obtint de Barère de Vieuzac, patron des Affaires étrangères et protecteur des Exagérés, un passeport pour Genève où il se rendit d'abord, et de là à Berne où il rencontra l'ambassadeur britannique sir Robert Fitzgerald^[11].

A Nevers avec Fouché à l'automne 1793, Chaumette semble avoir appliqué à la lettre les recommandations de Bertrand Barère de Vieuzac qui préconisait l'exagération en toute chose, en Vendée et ailleurs. Il fut un partisan de la déchristianisation dans un pauys où les mentalités étaient profondément attachées aux valeurs chrétiennes, et contribua, ainsi que Robespierre le lui reprocha, à démoraliser le peuple. Par esprit de démagogie il se promenait en public en bonnet et sabots, et il prit le nom d'Anaxagoras en référence au philosophe grec antique qui fut pendu pour athéisme. Il inventa les fêtes de la Raison, qui se célébraient à Notre-Dame, et dont la déesse était représentée par une actrice de l'Opéra.

Il fut arrêté en même temps que Hébert comme traître à l'idéal de la Révolution, et fut victime de l'offensive de Robespierre et Danton contre les « exagérés^[12] ».

Au Tribunal révolutionnaire, il fut accusé, entre autres, d'avoir « cherché à anéantir toute espèce de morale, effacer toute idée de divinité et fonder le gouvernement français sur l'athéisme ». Condamné à mort au terme d'un procès totalement inéquitable, il fut guillotiné le 13 avril 1794 avec un amalgame d'Exagérés (les Grammont père et fils, l'évêque Gobel, etc.) et de Modérés (le député Philibert Simond, le général Arthur Dillon, Lucile Desmoulins, etc;).

Il avait épousé une demoiselle Simonin au début de la Révolution.

Notes

1. ↑ Mémoires, p.9
2. ↑ Esquisses: l'auteur reprend les interrogations de l'auteur de L'histoire secrète de Coblence que les royalistes de la Restauration, incapables d'admettre que "l'ignoble Chaumette" ait pu servir les intérêts de la contre-révolution, ont rejeté avec mépris.
3. ↑ AN, F/7/4648, II. Voir aussi Alger, p.61.
4. ↑ Olivier Blanc, Les Espions de la Révolution et de l'Empire, Paris, 1995.
5. ↑ Voir Révolution française, vol.43, 1902, p.122
6. ↑ Buchez et Roux, Histoire parlementaire, vol.XXVI, p.300
7. ↑ Question qui a donné lieu à une très ridicule controverse entre Alphonse Aulard et Albert Mathiez au début du XX^e siècle
8. ↑ Plusieurs révolutionnaires comme Héron ou Collot d'Herbois s'intéressaient comme Chaumette aux milieux de la prostitution masculine
9. ↑ Olivier Blanc, Marie-Olympe de Gouges, une humaniste à la fin du 18e siècle, 2003
10. ↑ John Hurford Stone, imprimeur, espion britannique à Paris, protégé par Bertrand Barère de Vieuzac qui l'aida à émigrer à Bâle avec un autre espion du nom de Vaughan
11. ↑ Voir AN, W47/3148
12. ↑ Chaumette appartenait au mouvement des Exagérés de la Commune de Paris et il n'a jamais été proche des "enragés"

Sources

• Alexandre Tuetey, Répertoire des sources manuscrites de l'histoire de Paris pendant la Révolution (11 volumes).
• Dunouy, Vérités incontestables sur Chaumette, Paris, SD., 22 pages.
• Albert Mathiez, Anecdotes sur Chaumette, Annales historiques de la Révolution française, 1922, p.477-500.
• Feuilles d'histoire, , n°10, octobre 1909.
• R. Bittard des Portes, Chaumette et la guerre de Vendée, 1902.

Bibliographie

Les rares travaux récents concernant Chaumette se sont intéressés exclusivement à ses actes et discours officiels à la commune et dans les clubs, généralement interprétés comme l'expression de son patriotisme intransigeant et jamais comme populistes :

• Nicole Bossut, Chaumette porte-parole sans culotte, CTHS, 1998.
• Dictionnaire historique de la Révolution française, sous la direction de Jean-François Surrateau et François Gendron, PUF, 1989.

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