Phobie sociale

Phobie sociale
Phobies sociales
Classification et ressources externes
CIM-10 F40.1, F93.2
CIM-9 300.23
MeSH D010698

La phobie sociale ou anxiété sociale (DSM-IV 300.23) est un trouble de l'anxiété caractérisé par une crainte (appréhension, inconfort émotionnel ou inquiétude) persistante et intense causant une détresse considérable et une capacité diminuée de quelques fonctions dans la vie quotidienne. Elle est causée par la crainte, pour un individu, de se trouver face à une situation sociale durant laquelle il s'expose à une interaction avec d'autres individus.

Les personnes affectées par cette pathologie savent que leurs craintes sont irrationnelles. Pourtant, elles appréhendent énormément les situations dans lesquelles elles sont confrontées au regard des autres. Ainsi elles font tout pour les éviter. Lorsqu'elles sont dans les situations redoutées, les personnes atteintes de phobie sociale ont tendance à croire qu'elles sont jugées négativement. Celles-ci craignent d'être vues comme anxieuses, folles ou stupides. De facto, elles s'isolent.

Sommaire

Historique

Pierre Janet utilise pour la première fois le terme « phobie sociale » en 1903 et range ce trouble dans le groupe des phobies de situations, aux côtés de l’agoraphobie et de la claustrophobie. Il intègre par ailleurs au groupe des phobies sociales l’éreutophobie (crainte de rougir en public), la phobie du mariage, la phobie du professeur devant faire la classe et la phobie des domestiques (ne rien oser demander à sa bonne). Dans les années soixante, le terme de phobie sociale sera repris par les comportementalistes qui travaillent sur les techniques d’exposition et d’affirmation de soi. Ils contribueront à l’individualisation du trouble dans les années soixante-dix avec Marks et Gelder qui définiront la phobie sociale comme une crainte de parler, de manger, de boire, de trembler, de rougir, d’écrire, de vomir en présence des autres.

Définition

La phobie sociale (DSM-IV 300.23) consiste en une crainte persistante et intense d'une ou de plusieurs situations sociales ou de performance qui peuvent exposer la personne à l'observation attentive d'autrui. Celle-ci craint que ses actions la mettent dans une situation embarrassante ou humiliante. Par ailleurs, les enfants qui ont ce trouble ont des relations normales surtout avec leur proches, et leurs amis. Mais ceci n'est pas systématique, il faut en fait que le sujet soit certain d'être aimé pour pouvoir s'impliquer dans des relations. Il faut un autre critère pour poser ce diagnostic, soit que la situation sociale redoutée provoque chaque fois la même anxiété, qui peut prendre la forme d'une crise de panique. Les situations sociales ou de performance provoquent une détresse intense et sont évitées, mais cet évitement perturbe profondément les activités de l'individu, notamment les activités scolaires de l'enfant. Enfin, pour poser ce diagnostic chez une personne de moins de 18 ans, il faut que les symptômes durent depuis au moins six mois.

Les phobies sociales peuvent être très variées (on estime que 3% à 13% de la population en est atteinte), cela peut aller d'une gêne limitée à une situation (éreutophobie : crainte de rougir en public) jusqu'à un blocage social complet, empêchant la personne de sortir de chez elle.

Attention de ne pas confondre la phobie sociale et la timidité ou le trac. Ce sont des réactions normales, et qui arrivent à se combattre par la volonté. La phobie sociale va bien au-delà, la souffrance est réelle et demande souvent un traitement psychologique pour apprivoiser ces réactions.

Origine

La phobie sociale est généralement un comportement acquis. Parmi les causes environnementales, on trouve des situations d'environnement familial renfermé, diminuant les expériences de sociabilisation. La phobie devient acquise lors de l'adolescence, parfois à la suite d'un événement traumatisant.

La phobie sociale peut aussi être due à une surprotection de l'enfant par des parents trop possessifs ou eux-mêmes angoissés. L'enfant est alors peu habitué à se retrouver seul et a tendance à rester dépendant de ses parents à l'adolescence et même à l'âge adulte.

Une étude par imagerie TEP (tomographie par émission de positons) a montré que chez les sujet phobiques sociaux, l’accroissement d'anxiété au moment de s'exprimer en public était accompagnée par une suractivation du complexe amygdalien par rapport aux sujets témoins (Tillfors et al.[1] 2001). L'hyperactivité de l'amygdale des anxieux sociaux a ensuite été vérifiée dans de nombreuses situations. Par exemple, l'activation de leur amygdale à la vue de visages en colère ou effrayés est plus grande que chez les sujets témoins et l'ampleur de l'activation est positivement corrélée à la sévérité de leurs symptômes[2].

Symptômes

Les symptômes d'un phobique social sont nombreux. En voici quelques-uns :

  • Anxiété, parfois associée à des attaques de panique.
  • Anxiété anticipée, avant même la situation redoutée.
  • Anxiété intense à l'intérieur d'un petit groupe de personnes.
  • Tremblements, dans les mains, les jambes ou la voix.
  • Érubescence.
  • Sueur importante.
  • Crainte d'être observé et jugé négativement par les autres.
  • Crainte de balbutier et de rougir.
  • Crainte d'être vu comme fou, faible ou stupide.
  • Crainte de ne pas intéresser les autres.
  • Tendance à éviter les situations sociales dans lesquelles la personne se sent gênée (isolement).

Certains utiliseront l'alcool ou autres drogues pour atténuer les peurs/inhibitions liées à des activités sociales. Il est très commun, chez les personnes atteintes, de s'auto-traiter de cette façon, plus fréquemment lorsque le trouble est non-diagnostiqué ou non-traité. Il en résulte souvent une dépendance à l'alcool ou aux drogues. En effet, environ 39 % des phobiques sociaux présentaient au moins un abus ou une dépendance à une substance psychoactive.[réf. nécessaire]

Situations redoutées

Les situations sociales dans lesquelles les personnes touchées par cette pathologie montrent ces symptômes sont :

  • Parler en public.
  • Boire ou manger en public.
  • Aller à ou organiser des fêtes.
  • Écrire et signer en public.
  • Traverser les passages cloutés.
  • Regarder une personne dans les yeux.
  • Crainte de parler et d'engager une conversation.
  • Passer des appels téléphoniques.
  • Donner et défendre ses propres opinions.
  • Se retrouver avec des personnes qui les attirent.
  • Se retrouver dans un espace clos où se trouvent de nombreuses personnes (magasins, centres commerciaux,etc.).
  • Se faire des amis.
  • Parler avec des personnes qui représentent l'autorité.
  • Donner et recevoir des compliments.
  • Crainte d'attendre des personnes devant chez soi (portail ou porte).
  • Prendre le bus, le métro et tous types de transports communs.
  • Marcher dans la rue.
  • Aller chez le coiffeur, le médecin, à l'hôpital...
  • Parler de soi.
  • Parler une langue étrangère, même maîtrisée.
  • Aller à la piscine, à la plage, se changer dans des vestiaires communs...

La phobie sociale est dite généralisée si une personne présente la quasi totalité de ces peurs. Dans la réalité, la majorité des patients est plutôt concernée par certaines situations, d'où le terme anxiété sociale parfois préféré par les thérapeutes.

Exemple

Les personnes atteintes de phobie sociale pensent que toutes les personnes autour d'elles les regardent d'une manière différente ou perçoivent quelque chose d'étrange sur elles (principalement sur le visage). Par conséquent, les personnes qui souffrent de phobie sociale tentent d'éviter le regard des gens et marchent la tête baissée. Certaines personnes font tout pour ne pas sortir de chez elles ou, lorsqu'elles sortent, elles se sentent soulagées de revenir chez elles, le seul endroit où elles se sentent en sécurité.

Trouble de la personnalité évitante

Selon l'approche française, il s'agit d'un repli sur soi-même dû à un manque de confiance en soi. Il consiste à éviter les situations d’angoisse liées à la crainte d’être jugé, se retrouvant sous forme de timidité, de sensibilité au rejet et à la critique, et d'anxiété.

D'après le classement du DSM-IV : Il s'agit d'un mode général d'inhibition sociale, de sentiments de ne pas être à la hauteur et d'hypersensibilité au jugement négatif d'autrui qui apparaît au début de l'âge adulte et est présent dans des contextes divers, comme en témoignent au moins quatre des manifestations suivantes :

  1. Le sujet évite les activités sociales professionnelles qui impliquent des contacts importants avec autrui par crainte d'être critiqué, désapprouvé ou rejeté ;
  2. réticence à s'impliquer avec autrui à moins d'être certain d'être aimé ;
  3. est réservé dans les relations intimes par crainte d'être exposé à la honte et au ridicule ;
  4. craint d'être critiqué ou rejeté dans les situations sociales ;
  5. est inhibé dans les situations interpersonnelles nouvelles à cause d'un sentiment de ne pas être à la hauteur ;
  6. se perçoit comme socialement incompétent, sans attrait ou inférieur aux autres ;
  7. est particulièrement réticent à prendre des risques personnels ou à s'engager dans de nouvelles activités par crainte d'éprouver de l'embarras.

Comorbidité

Quelques études, au Brésil notamment, ont montré que :
  • 72 % des personnes souffrant de phobie sociale sont aussi victimes d'une dépression majeure (en associant la dysthymie et la dépression).
  • 28 % présentent des symptômes de troubles du comportement (attaques de panique).
  • 11 % ont des troubles obsessionnels compulsifs (TOC).
  • 11 % déclarent abuser ou être dépendants de l'alcool.
  • 6 % des personnes touchées par cette pathologie ont une phobie sociale généralisée.

Une autre étude a montré que :

  • 45 % de ces personnes sont aussi atteints d'agoraphobie.
  • 19 % sont dépendants à la drogue.
  • 17 % sont alcooliques.
Enfin, environ 15 % des phobiques sociaux présentant des troubles dépressifs ont déjà tenté de se suicider.

[réf. nécessaire]

Traitements

Une baisse de l'estime de soi est couramment engendrée par ce trouble, après des années elle peut engendrer une dépression. Si le trouble n'est pas résolu, cette boucle peut se reproduire. Le risque de dépression majeure chez un phobique social est multiplié par trois.

Ordre de priorité de traitement :

  1. La dépression (habituellement traitée comme une dépression classique).
  2. L'anxiété et le trouble en lui-même.

Les thérapies les plus conseillées pour la phobie sociale :

  1. Les thérapies Comportementales & cognitives (TCC), ou thérapie cognitive basée sur la pleine conscience (MBCT)
  2. Les groupes d'affirmation de soi,
  3. Les cours de théâtre (improvisation ...) dédiés aux personnes qui en souffrent.

Discussion

Le diagnostic de phobie sociale a fait l'objet de controverses notamment autour de la question du rôle qu'ont tenu les pharmas dans sa constitution. Les anglo-saxons évoquent ce scepticisme sous l'expression de en:disease mongering. Le diagnostic de phobie sociale reste un diagnostic à étudier sur le long terme quant à sa validité autre que pour la délivrance de psychotropes[3].

Notes et références

  1. Tillfors M, Furmark T, Marteinsdottir I, Fischer H, Pissiota A, Långström B, Fredrikson M., « Cerebral Blood Flow in Subjects With Social Phobia During Stressful Speaking Tasks: A PET Study », dans The American Journal of Psychiatry, vol. 158, no 8, 2001 
  2. K. Luan Phana, Daniel A. Fitzgeraldb, Pradeep J. Nathanc, Manuel E. Tancerb, « Association between Amygdala Hyperactivity to Harsh Faces and Severity of Social Anxiety in Generalized Social Phobia », dans Biological Psychiatry, vol. 59, no 5, 2006 
  3. Christopher Lane: Comment la psychiatrie et l'industrie pharmaceutique ont médicalisés nos émotions, Ed.: Flammarion, coll.: Bibliothèque des savoirs, 2009

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie


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