Paul-Emile Deiber

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Paul-Émile Deiber

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Paul-Émile Deiber, né le 1er janvier 1925 à La Broque, est un comédien français.

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Biographie

Paul-Émile Deiber naît à La Roque dans le Bas-Rhin le 1er janvier 1925.

Après des études musicales de violon et de chant, il choisit le Centre d’art dramatique où il rencontre son maître Jean Debucourt. Engagé comme coryphée après un premier prix de tragédie aux concours du Conservatoire, il joue les héros de la tragédie classique et du drame romantique. Il marque quelques-uns des rôles de son emploi comme Oreste dans Andromaque de Racine, qu'il joue pendant seize ans, plus de cent fois. Georges Lerminier apprécie son interprétation : « Il ne s’est pas aventuré, m’a-t-il semblé, jusque dans les profondeurs de son personnage. Il l’a pris, non sans habileté, par le dehors, faisant notamment passer la rampe, moins par le sentiment que par le métier. »[1] Il fit ressortir le glissement vers la folie et élevant le ton d’une manière progressive, du calme à la démesure : « À la fin de l’acte V, presque trop calme d’abord, il a admirablement exprimé les fureurs d’Oreste », écrit Philinte[2].

Pour ses débuts, il est Ruy Blas – un rôle qu’il joue pendant près de vingt ans – aux côtés de Jean Yonnel, Marie Bell et Pierre Dux. C’est là un des problèmes majeurs que va rencontrer Paul-Émile Deiber : s’il a l’âge des personnages qu’il interprète, il joue avec des partenaires souvent beaucoup plus âgés que lui. Ainsi, Véra Korène, titulaire du rôle d’Hermione, a 24 ans de plus que lui ; Marie Bell, la reine dans Ruy Blas, est née en 1900. Comment mélanger la jeune troupe plus crédible dans les rôles de jeunes premiers et les éléments chevronnés indispensables à la pérennité de la Comédie-Française ? Pierre-Aimé Touchard a confié son embarras : « (…) j’ai laissé jouer Andromaque dans la même mise en scène pendant six ans, n’osant choisir entre Yonnel et Deiber pour le rôle d’Oreste. »[3]

Dans la tragédie, il est encore Néron de Britannicus dans les mises en scène de Julien Bertheau puis de Jean Marais ; Horace de la pièce éponyme dans la mise en scène de Jean Debucourt ; Maxime (Cinna de Pierre Corneille) dans la mise en scène de Maurice Escande. Pendant de longues années, il prête ses traits à Antiochus de Bérénice de Racine aux côtés d'Annie Ducaux, puis de Renée Faure et de Denise Noël… Il alterne avec André Falcon dans le rôle de Don Rodrigue (Le Cid de Pierre Corneille, pièce dont il a interprété tous les rôles masculins à l'exception de celui de Don Alonse), puis dans celui d'Hernani (Hernani). Il remplace Jean Marais dans le rôle de Néron et dans le rôle de Xipharès (Mithridate de Racine). L'alternance lui permet également de jouer Nicomède, Bajazet, Chatterton…

Pierre Dux donne une idée assez juste de son talent : “Votre voix, une belle voix grave, admirablement timbrée, votre diction, une connaissance précise du vers classique et romantique, un sens théâtral inné ...“ (Discours de réception au titre de chevalier de la légion d'honneur, 6 novembre 1972). Avec lui, Sire le Mot est Roi. Tout dans son expression – sa voix mais aussi son allure – manifeste l’émotion. De ce point de vue, son jeu va à l’encontre des tendances dominantes de la Comédie-Française de l’époque qui, pour sortir de la crise de la représentation tragique, privilégie le goût du spectaculaire et de l’ostentatoire dans les mises en scène.

Selon les témoignages de ses camarades ou de ceux qui l'approchèrent, Paul-Emile Deiber est doué d'une mémoire prodigieuse ce qui lui permet de reprendre les rôles les plus importants au pied levé, dont celui de Cyrano, après avoir interprété beaucoup de personnages dans Cyrano de Bergerac, le chef-d’œuvre de Rostand et alors qu'il n'a que vingt-sept ans. Dans son interprétation de Cyrano, il poétise le rôle et le tire vers l'émotion et le romantisme. De ce point de vue, son interprétation s'oppose à celles plus tonitruantes de ces devanciers ou de Jean Piat, avec qui il alterne dans la mise en scène de Jacques Charon. Claude-Henry Lecomte écrit qu'il « montre force tendresse et panache. Escogriffe très humain arraché aux déclamations usagées. Par le ton, le rythme, Deiber renouvelle littéralement la tirade des nez et la ballade du duel. Une salle archi-comble l'ovationne. Comme les mélomanes acclament une diva qui vient de pousser le grand air de Norma »[4].

Au cours de sa carrière, il évolue également vers un emploi plus large et aborde les grands premiers rôles de Molière tels que Molière (L'Impromptu de Versailles), Orgon (Tartuffe) ou Alceste (Le Misanthrope). On écrit de lui que « sa création du personnage d'Orgon fut captivante : sobre, clair, noble même et distant… »[5]. Il va particulièrement marquer le rôle d'Alceste de sa sensibilité en choisissant d'accentuer les aspects émouvants du personnage.

Au fil des années, son emploi évolue et il choisit d'interpréter les rôles pleins de fantaisie de Labiche (Les Trente Millions de Gladiator ou l'inénarrable Piget dans Vingt-neuf degrés à l'ombre) ou Feydeau (Soldignac dans Le Dindon ou encore le général Irigua dans Un fil à la patte).

Peut-être trouve-t-il son plein épanouissement à la fin de sa carrière à la Comédie-Française, par exemple lorsqu'il reprend, après Jean Yonnel, le rôle de Ferrante dans La Reine morte d'Henry de Montherlant. Jean-Jacques Gautier analyse avec précision son interprétation : « J'ai commencé par lui en vouloir de ses éclats du début. À mon sens, le mépris n'élève pas la voix. Il ne hausse pas tellement le ton. Il ne crie pas si fort. Il ne se met pas en colère. Du moins, à ce stade de l'action. Calme, il n'est que plus accablant. Mais peu à peu, j'ai oublié cette mauvaise impression, et, lorsque Ferrante est descendu dans la politique ; quand il a engagé, avec l'un ou l'autre, l'entretien ; dès qu'il a commencé à dénoncer l'homme sous l'appareil du souverain ; à partir du moment où il s'est relâché, où ses défenses sont tombées une à une ; où il a jeté le masque, je me suis mis à approuver, un peu d'abord, davantage ensuite, complètement enfin, le comportement, l'attitude, le jeu, l'interprétation, la composition de P.-E. Deiber. »[6] Gabriel Marcel juge ainsi son interprétation : « Il faut rendre hommage sans plus tarder à Paul-Émile Deiber qui, dans le rôle écrasant du roi Ferrante a su maintenir dans l’autorité même une sorte de frémissement tragique qui, à bien des moments m’a bouleversé… C’est une révélation. »[7] Dans l'adaptation du roman de Dostoïevski, Crime et Châtiment, il fait une composition du personnage de Lougine que la critique salua dans son ensemble.

Il s'en va après vingt-sept années et sa dernière création a lieu à l'Odéon, dans Amorphe d'Ottenburg de Jean-Claude Grumberg, un rôle de roi fantoche, mis en scène par Jean-Paul Roussillon. Il revient en tant que sociétaire honoraire pour jouer Prusias de Nicomède (Pierre Corneille) dans la mise en scène de Françoise Seigner.

Il a réalisé plusieurs mises en scène de tragédie. Bérénice fut sans doute la plus importante. Georges Lerminier écrit : « Paul-Émile Deiber a certainement médité avec intelligence son explication de texte. Il a choisi les larmes, l’abandon un peu romantique à la souffrance qu’engendre l’irrémédiable rupture entre Titus et Bérénice. Le texte est dit en mineur avec ce qu’il faut de demi-soupirs et de silences lourds. »[8] De la même façon, Guy Leclerc reconnaît que cette mise en scène « a un très grand mérite, c’est de nous restituer ce Théâtre de l’Immobilité que doit être le théâtre tragique »[9]. Michel Déon juge : « La Bérénice mise en scène par Paul-Émile Deiber (…) est dans la tradition des Comédiens-Français et en cela elle m’a semblé admirable. Jamais la scène des adieux de Bérénice et Titus, jamais le discours d’Antiochus à la Reine de Césarée, jamais le départ de Bérénice ne m’avaient paru à ce point émouvants. »[10] Jean-Jacques Gautier est plus critique tant il déteste le décor et les costumes — « comment a-t-on permis à Monsieur Jacques Dupont de poser sur une tête cette tiare incroyable sans nul souci de ce qui peut convenir à tel visage ? »[11] — et le jeu de Renée Faure : « elle n’est pas et ne sera jamais Bérénice »[11].

Peu avant les évènements de 1968, Paul-Émile Deiber présente Andromaque que salue la critique : « Quant à Paul-Émile Deiber, il ne mérite que des éloges. Sa mise en scène est d’une sobriété, d’un goût parfaits, d’une nudité exemplaire. Pas de ces colonnades, de ces seuils de palais grecs ou romains qui fleurent le conventionnel. Simplement quelques marches vermoulues à droite, un petit tertre à gauche et, au fond, embrassant entièrement la scène, l’immensité bleue d’un ciel de l’Épire. Une vision de toute beauté qui rejoint merveilleusement la beauté racinienne. »[12] Enfin Paul-Émile Deiber présenta un Cid qui partage la critique. Tandis que Gilles Sandier se déchaîne : « Arrêtez le massacre »[13] et n'y va pas par quatre chemin : « Un spectacle lamentable, déshonorant »[13], Gilbert Guilleminault juge ainsi le spectacle : « C’est un Cid plein de jeunesse, de fraîcheur et de naïveté, plus proche de ses origines médiévales, que nous offre aujourd’hui la Comédie-Française. »[14]

Enfin, Paul-Émile Deiber renoue avec la tradition des comédiens-auteurs en présentant un spectacle-hommage à Molière (La Troupe du Roy). Il fut pendant vingt-cinq ans une des chevilles ouvrières de la Maison, responsable avec Béatrix Dussane des soirées littéraires.

En 1972, il épouse la cantatrice Christa Ludwig.

Après son départ de la Comédie-Française, il assure des fonctions de directeur de la mise en scène à l'Opéra de Paris, puis il prend la direction du théâtre de Boulogne-Billancourt.

Carrière à la Comédie-Française

  • Coryphée du 15 octobre 1944 au 1er janvier 1945
  • Pensionnaire du 1er janvier 1945 au 1er janvier 1954
  • 424 e Sociétaire du 1er janvier 1954 au 31 décembre 1971
  • Sociétaire honoraire à partir du 1er janvier 1972

Formation

Œuvres jouées ou mises en scène

Rôles à la Comédie-Française

m.e.s. : mise en scène

Mises en scène à la Comédie-Française

Activités hors Comédie-Française

Mises en scène d'œuvres lyriques

(à compléter)

Notes et références

  1. L’Aube, le 19 mars 1949
  2. Dans Époque, le 27 février 1949
  3. Six années à la Comédie-Française, p. 86
  4. Dans Valeurs actuelles le 17 juillet 1972
  5. Dans le magazine L'Avant-scène n°368, le 15 novembre 1968
  6. Dans Le Figaro, octobre 1966
  7. Dans Les Nouvelles littéraires, le 13 octobre 1966
  8. Dans Le Parisien libéré, le 15 novembre 1962
  9. Dans L’Humanité, le 19 novembre 1962
  10. Dans Les Nouvelles Littéraires, le 22 novembre 1962
  11. a  et b Dans Le Figaro, le 16 novembre 1962
  12. Par le critique de L’Aurore, André Ransan, le 7 mai 1968
  13. a  et b Dans Arts, le 13 septembre 1963
  14. Dans L’Aurore, le 8 novembre 1963

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