Niches écologiques

Niches écologiques

Niche écologique

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Deux espèces de lichens ; l'une verte (à gauche) et l'autre orange (à droite) cohabitent sur ce rocher dans deux niches écologiques différentes, résultant des conditions d'exposition et d'hygrométrie.
Deux espèces (mousses et lichens) cohabitent sur le même tronc, mais dans deux niches écologiques distinctes, notamment induites par l'élévation et l'hygrométrie.
Diverses espèces de mousses et lichens épiphytes cohabitent dans ce qui semble être une même niche écologique, en situation de concurrence, ou de complémentarité, dans un équilibre dynamique, avec des variations saisonnières d'abondance et de vitalité.
Lichen sur un rocher alpin

La niche écologique est un des concepts théoriques de l'écologie. Il traduit à la fois :

  1. la « position » occupée par un organisme, une population ou plus généralement une espèce dans un écosystème,
  2. la somme des conditions nécessaires à une population viable de cet organisme.

La description d'une telle « niche » (ou « enveloppe écologique ») se fait sur la base de deux types de paramètres :

  1. des paramètres physico-chimiques caractérisant les milieux où évolue l'organisme (et parfois significativement modifié par cet organisme).
  2. des paramètres biologiques, incluant les relations avec les espèces avoisinantes et la modification de l'habitat par l'organisme et la communauté d'espèces dans laquelle il s'inscrit (interactions durables).

G.E. Hutchinson (1957) définit une niche écologique comme un hypervolume (une « enveloppe »)où chaque dimension de l'espace est une ressource (alimentaire, en matériaux, spatiale, offre en cachette, substrats ou perchoirs, etc.) de l'environnement. Ces ressources - selon qu'elles sont plus ou moins renouvelables dans l'espace et dans le temps - sont des conditions limitantes qu'on peut hiérarchiser pour étudier la vulnérabilité de l'espèce dans l'environnement.


Sommaire

Types de niches écologiques

On distingue deux sortes de niches :

  • Niche fondamentale : elle réunit tous les composants et toutes les conditions environnementales nécessaires à l'existence d'un organisme.
  • Niche réalisée : elle est proche ou ressemble à la niche fondamentale à laquelle un organisme est pratiquement adapté mais qu'il a été contraint d'occuper.

L'ensemble des conditions biophysique permettant à un organisme d'exister est localisé dans la « niche fondamentale ». De par la compétition, l'interaction avec d'autres organismes et les phénomènes physiques, la niche fondamentale de l'organisme se réduit à l'espace le plus approprié. Dans différents cas d'espèces adaptées, l'espace devient la niche réalisée. Une « zone d'adaptation », l'écotone par exemple, est un éventail de niches écologiques qui peuvent être occupées par un groupe d'espèces exploitant les mêmes ressources par des moyens similaires [1].

Théories

En théorie, deux espèces (sauf dans le cas d'espèces symbiotes) ne peuvent occuper une même niche écologique durablement. En effet, il en résulte une compétition et les lois de la sélection naturelle tendent à favoriser celle qui est la mieux « adaptée » à la niche (c'est-à-dire celle qui peut se reproduire, se nourrir et se protéger le plus efficacement).

Cependant, des espèces différentes peuvent occuper des niches fonctionnellement identiques mais géographiquement séparées.

Deux espèces peuvent occuper un même territoire géologique, mais dans des niches écologiques différentes.
Deux espèces peuvent aussi occuper des niches écologiques chevauchantes dans l'espace et/ou dans le temps, c'est-à-dire que seulement une partie des dimensions de l'hypervolume de Hutchinson sont occupées de manière simultanée. On parle alors de recouvrement, et s'il n'est pas trop important, les deux espèces peuvent cohabiter. Il en résulte une compétition extraspécifique qui peu réduire les effectifs de chacune des deux populations par rapport à celui qu'elles auraient en occupant seule toutes les dimensions. Les ressources disponibles étant un facteur limitant à considérer dans les évaluations de cet ordre.

Pour qu'il y ait coexistence (de deux espèces au moins), il faut :

  • que chaque population ait accès à une niche fondamentale inférieure au point d'offre du milieu ;
  • que chaque population consomme une partie de la ressource limitante et que les facteurs limitants soient différents pour chaque espèce ;
  • que la compétition intraspécifique soit complémentaire à la compétition interspécifique.


L'écotone délimitant deux habitats peut être une niche écologique pour les espèces typiques de ces milieux, tout en accueillant épisodiquement des espèces typiques des habitats adjaçants. Ces dernières y voient toutefois généralement leurs fitness (chances de survie) diminuées.

Études qualitatives et quantitatives

L'existence des niches écologique a notamment pu être vérifiée du point de vue trophique par l'étude de la circulation d'isotopes stables (Carbone 13 par exemple) [2] qui permet d'identifier avec certitude certains liens de type prédateurs-proies, déchets métaboliques-décomposeurs, etc. L'étude des rations d'isotopes stables (ceux du carbone et de l'azote sont les plus utilisés) peut donc fournir une représentation de la position d'un organisme dans une niche trophique et ils sont à ce titre de plus en plus utilisés pour étudier certains aspects (qualitatifs) de la structure de la chaîne alimentaire. Depuis peu, les isotopes stables sont aussi utilisés pour caractériser quantitativement les échelles et tailles des éléments de la structure trophique dans une communauté écologique, parfois en s'inspirant des approches écomorphologiques. Cette double approche devrait permettre de mieux cerner le fonctionnement des chaînes alimentaires dans leurs structures, fonctions et dynamiques, ce qui et important pour par exemple mieux mesurer (puis anticiper, si des modèles peuvent être déduits de ces recherches) les impacts de certaines pollutions (dont la pollution lumineuse), de la fragmentation écologique, de la surexploitation d'un milieu (surpêche par exemple), l'adaptation d'un écosystème aux dérèglements climatiques, etc.
Ce type de traçage isotopique dans un réseau trophique a par exemple déjà permis de confirmer d'autres études[3] montrant l'importance des corridors biologiques à des échelle centimétriques pour de très petits organismes (invertébrés vivant dans les mousses par exemple). Il a aussi montré que des prédateurs apparemment peu sensibles à la fragmentation de leur écosystème pouvaient néanmoins à terme disparaître[4].

Remarques

Un organisme peut occuper successivement ce qui apparait comme différentes niches écologiques, en fonction de son stade de développement ou de l'évolution de son environnement (Par exemple, certains organismes saproxylophages vivent en communautés qui se déplacent dans un tronc au rythme de sa décomposition, dont elles sont une partie des agents). On peut aussi considérer qu'il s'agit d'une seule niche écologique qu'on peut subdiviser selon leur position dans l'espace et/ou dans le temps de vie de l'espèce.

Les espèces pionnières peuvent occuper des niches écologiques qu'elles trouvent et qui leur sont appropriées, ou plus souvent, elles participent activement à leur construction et entretien. De nombreuses espèces « construisent » activement leur niche écologique ; ainsi les sphaignes en stockant les ions calcium acidifient le milieu à leur profit et au détriment d'autres espèces, sauf celles qui peuvent se développer dans un milieu acide et oligotrophe.

Le tube digestif d'un animal est la niche écologique du microbiote (la communauté de microorganismes (neutres, symbiotes ou parasites) à l'égard de leur hôte.

Les espèces très spécialisées sont plus dépendantes d'une niche écologique réduite, mais qu'elles exploitent a priori mieux.

Évolution

Régle évolutive au sein d'une convergence évolutive :


Niche écologique et conservation

Actuellement, les enjeux liés à la biodiversité prennent une importance majeure. Ils nécessitent donc la mise en place de méthodes de conservation. Pour une espèce, ces méthodes impliquent obligatoirement la conservation de sa niche écologique. En effet, cette dernière regroupe tous les facteurs écologiques nécessaires à la survie d'une espèce.

La modélisation des niches écologiques (ENM)[5] est un outil important pour l'évaluation de la conservation des espèces.


Voir aussi

Liens externes

Notes et références

  1. Selon Root, 1967
  2. Bearhop S. Determining trophic niche width: a novel approach using stable isotope analysis. J. Anim. Ecol. 2004;73:1007–1012.
  3. Minna-Liisa Rantalainen, Jari Haimia, Hannu Fritze and Heikki Setälä ; Effects of small-scale habitat fragmentation, habitat corridors and mainland dispersal on soil decomposer organisms  ; doi:10.1016/j.apsoil.2006.03.004 ; 2006 ;Ed : Elsevier
  4. Craig A Layman, John P Quattrochi, Caroline M Peyer, Jacob E Allgeier, and Katharine Suding ; Niche width collapse in a resilient top predator following ecosystem fragmentation ; Ecol Lett. 2007 October; 10(10): 937–944. ; doi: 10.1111/j.1461-0248.2007.01087.x. ; PMCID: PMC2040226 ; 2007 Blackwell Publishing Ltd/CNRS (Article en ligne)
  5. POISSON


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