Marie-Antoinette d'Autriche

Marie-Antoinette d'Autriche
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Marie-Antoinette d’Autriche
Marie-Antoinette en 1783, par Élisabeth Vigée-Le Brun.
Marie-Antoinette en 1783, par Élisabeth Vigée-Le Brun.

Nom de naissance Maria Antonia Anna Josepha Joanna de Habsbourg-Lorraine
Naissance 2 novembre 1755
Flag of the Habsburg Monarchy.svg Vienne (Archiduché d'Autriche)
Décès 16 octobre 1793 (à 37 ans)
Drapeau de la France Paris (République française)
Activité principale Reine de France de 1774 à 1792
Autres activités Reine de Navarre de 1774 à 1792
Madame le dauphine
Archiduchesse d’Autriche
Ascendants François Ier de Lorraine
Marie-Thérèse
Conjoint Louis XVI de France
Enfant Marie-Thérèse de France
Louis-Joseph de France
Louis XVII
Sophie-Béatrice de France

Maria Antonia Anna Josepha Joanna de Habsbourg-Lorraine, plus connue sous le nom de Marie-Antoinette d'Autriche ou Marie-Antoinette de France[réf. nécessaire] (Vienne, 2 novembre 1755 – morte guillotinée à Paris, le 16 octobre 1793), était archiduchesse d’Autriche, princesse impériale, princesse royale de Hongrie et de Bohême, dauphine de France, reine de France et de Navarre (17741792), épouse de Louis XVI, roi de France. Elle était la sœur de Joseph II d’Autriche et de Léopold II d’Autriche. Elle fut surnommée « l'Autrichienne » dès son arrivée à la cour de France puis « Madame Déficit » et, plus tard, « Madame Véto ».

Sommaire

Jeunesse à Vienne

Marie-Antoinette est la quinzième et avant-dernière enfant de l’empereur germanique François Ier de Lorraine et de l’archiduchesse d’Autriche, reine de Hongrie et de Bohême Marie-Thérèse dite « la Grande », au milieu de leurs cinq fils (Joseph l’héritier du trône, Léopold, Charles, Ferdinand et Maximilien) et de leurs huit filles (Marie-Anne, Marie-Christine, Marie-Élisabeth, Marie-Amélie, Marie-Jeanne, Jeanne-Gabrielle, Marie-Josèphe, Marie-Caroline)[1].

Elle naît le 2 novembre 1755, au palais de la Hofburg, à Vienne[a 1]. Ses parrain et marraine sont le roi Joseph Ier de Portugal et son épouse la reine Marie-Anne d'Espagne[a 2]. On apprend quelques jours plus tard qu'un tremblement de terre a ravagé Lisbonne la veille de la naissance de l'archiduchesse, jour de la Toussaint[a 2]. D'aucuns y verront — surtout après coup — un mauvais présage.

Pastel de Marie Antoinette réalisé par Joseph Ducreux en 1769 à l'intention du Dauphin afin qu'il puisse faire connaissance de sa future épouse.

L'archiduchesse est baptisée sous les prénoms de Maria Antonia Anna Josepha Joanna[a 2]. Elle est aussitôt confiée aux « ayas », les gouvernantes de la famille royale comme Mme de Brandeis[b 1] et partage son enfance entre le palais de la Hofburg à Vienne et le château de Schönbrunn[a 3]. La légende voudrait que la jeune Marie-Antoinette ait rencontré le tout jeune enfant prodige Mozart à la cour de son père, et qu’il l’aurait alors demandée en mariage[a 4],[b 2],[2].

Marie-Antoinette reçoit une éducation où le maintien, la danse, la musique et le paraître occupent l’essentiel de son temps et ne bénéficie d’aucune instruction politique. Cependant, à l'âge de dix ans, elle a encore du mal à lire ainsi qu’à écrire en allemand, parle peu et difficilement le français, et très peu l’italien – trois langues qui étaient alors parlées couramment dans la famille impériale, sans compter son apprentissage des rudiments de latin[a 5]. Mme de Brandeis, rendue responsable par l'impératrice du retard de la jeune princesse, est congédiée et est remplacée par Mme de Lerchenfeld[a 6], plus sévère.

À cette époque, la cour d’Autriche possède une étiquette beaucoup moins stricte que celle de Versailles : les danses y sont moins complexes, le luxe y est moindre et la foule moins nombreuse. La jeune Maria Antonia Josepha est très proche de sa plus jeune sœur aînée, Marie-Caroline, qui deviendra reine de Naples en épousant Ferdinand Ier des Deux-Siciles[b 3].

Sa mère Marie-Thérèse, comme tous les souverains de l’époque, met le mariage de ses enfants au service de sa politique diplomatique qui vise à réconcilier, après des décennies de guerres fratricides, les Habsbourg et les Bourbons, et faire ainsi face aux ambitions de la Prusse et de l'Angleterre. Ainsi, parmi les sœurs aînées de Marie-Antoinette, seule Marie-Christine, l’enfant préféré de l’impératrice, peut épouser en 1766 l'homme qu'elle aime, Albert de Saxe, créé duc de Teschen par Marie-Thérèse[3], et elle sera nommée avec lui régente des Pays-Bas en 1780. En revanche, Marie-Amélie épouse contre son gré, en 1769, Ferdinand Ier, duc de Parme[3], et Marie-Caroline épouse en 1768 Ferdinand IV, le roi de Naples et des Deux-Siciles[b 3], après que deux sœurs successivement promises au jeune monarque sont mortes prématurément[a 7],[3].

Désormais veuve depuis le décès de François Ier[a 8], extrêmement douloureux pour Marie-Antoinette, Marie-Thérèse prend en mains la vie de ses filles et le mariage entre le dauphin – futur Louis XVI – et Marie-Antoinette qui doit concrétiser la réconciliation des deux Maisons les plus prestigieuses d'Europe semble poindre. Louis XV ne voit pas d'inconvénient au mariage de la princesse avec son petit-fils à condition que celle-ci soit capable de parler convenablement français. Cela semble perdu d'avance. C'est pourquoi Mathieu-Jacques de Vermond est envoyé à la Cour pour s'occuper de la future dauphine[a 8]. Celle-ci semble bien progresser[a 9]. Elle est alors prise en charge par de grands professionnels français afin d'améliorer entre autres sa dentition, alors très mauvaise, et sa coiffure[a 9],[a 10].

Le 7 février 1770 au soir, Marie-Antoinette est réglée, prête à être donnée en mariage[a 10]. Cela ne tarde pas, le 17 avril 1770, Marie-Antoinette renonce officiellement à ses droits sur les couronnes dépendant de la Maison d’Autriche. Le 19 avril 1770, on célèbre son mariage par procuration, à cinq heures du soir, dans l'église des Augustins[a 11]. Seul le mariage de Louis XIV avec l'infante d'Espagne un siècle auparavant avait eu un semblable retentissement. Par ailleurs, on n'avait pas vu une archiduchesse d'Autriche sur le trône de France depuis Élisabeth d'Autriche, épouse de l'éphémère Charles IX en 1570.

Deux jours plus tard, au petit matin, elle quitte Vienne pour ne jamais y revenir[a 12]. Elle a quatorze ans. Sa mère lui laisse alors un grand nombre de recommandations[b 4]. De douloureux pressentiments entourent alors son départ de Vienne. Weber dira, dans ses mémoires : « On a peine à se défendre de la superstition des pressentiments quand on a vu les adieux de Marie-Antoinette à sa famille, à ses serviteurs et à son pays, en 1770. Hommes et femmes se livrèrent aux mêmes expressions de la douleur. Les avenues, comme les rues de Vienne en retentirent. On ne rentrait chez soi qu'après avoir perdu de vue le dernier courrier qui la suivait, et l'on y rentrait que pour gémir en famille d'une perte commune. »[b 5]. L'impératrice sa mère semble aussi touchée par le phénomène. Une anecdote raconte que Joseph Gassner, ecclésiastique venu chercher l'asile à Vienne, se croyant inspiré par Dieu, à une question de Marie-Thérèse lui demandant comment allait sa fille, ne répondit pas, pâlit, et finit par articuler : « Madame, il est des croix pour toutes les épaules. »[b 6].

En chemin pour la France, Marie-Antoinette croise le cortège de sa tante paternelle Anne Charlotte de Lorraine, qui, comme toute sa famille, est résolument opposée à l'alliance avec la France qui a dépossédé ses ancêtres des duchés sur lesquels ils avaient régné près de sept-cents ans…

L'arrivée en France

Après près de trois semaines de voyage, le 7 mai 1770, la jeune Marie-Antoinette arrive à Kehl[b 7] où elle doit participer au rite de « remise de l'épouse », tradition de l'Ancien Régime[a 13]. Au moment de quitter le Saint-Empire, tous les biens venant de son pays d’origine, même ses vêtements, lui sont retirés dans un bâtiment construit à cet effet sur l'île aux Épis, au milieu du Rhin, entre les villes de Kehl et de Strasbourg, formant ainsi une sorte de « rite de passage » de sa vie de jeune fille à sa vie de femme[a 13]. Les deux entrées de ce bâtiment sont disposées de telle manière qu’elle y entre du côté autrichien et en ressort en France[4]. C'est alors qu'elle fait la connaissance de sa première femme d'honneur, Mme de Noailles[a 14] qui lui présente alors la duchesse de Villars, sa femme d'atour ainsi que les comtesses de Mailly, de Tavannes, la duchesse de Picquigny et la marquise de Duras, ses secondes femmes d'honneur[a 15],[b 8].

Une fois le rituel achevé, elle sort du bâtiment par la porte côté français, sous une pluie battante[b 9]. Arrivée à Strasbourg, le temps redevenu clément, elle est complimentée de toutes parts et à M. d'Autigny, maire de la ville, qui s'adresse à elle en allemand, elle répond : « Non ! Ne parlez point allemand, s'il-vous-plaît. À dater d'aujourd'hui je n'entends plus d'autre langue que le français. »[a 16]. Parvenue à l'Évêché, elle fait la connaissance du vieux cardinal de Rohan qui l'attend et reçoit trente-six jeunes femmes de la noblesse d'Alsace[b 10],[a 17]. Puis elle se rend le soir-même à la comédie où l'on donne alors Dupuis et Desronnais ainsi que la Servante maîtresse[b 11],[a 17]. Le lendemain, remerciant M. d'Autigny du bel accueil qui lui avait été réservé[b 12], elle quitte Strasbourg pour cinq jours de voyage, au bout duquel elle rencontrera enfin le dauphin à qui elle est promise[a 17].

À Saverne, sa première escale, elle voit pour la première fois une résidence princière française, le château des princes évêques de Strasbourg, alors récemment embelli[b 12]. Le 9 mai 1770, elle s'arrête à Nancy, ex-capitale du Duché de Lorraine devenu française depuis seulement quatre années[5]. Elle se recueille en l'église des cordeliers, devant les tombeaux de ses ancêtres paternels, les ducs de Lorraine et de Bar. Le 10, elle passe à Bar-le-Duc, le 11 à Châlons où elle assiste à la représentation de La Partie de chasse de Henri IV[a 18], le 12 à Soissons où elle séjourne quarante-huit heures. Weber écrit aussi, à propos de ce voyage : « Sur la route, tous les habitants des campagnes abandonnent leurs travaux pour venir la saluer. Les chemins sont jonchés de fleurs ; les jeunes filles, dans leurs plus belles parures, présentent leurs bouquets à la dauphine, qui sourit à la naïveté des unes, daigne répondre aux compliments des autres, et les accueille toutes avec bonté. À vingt lieues de Strasbourg, les habitants des villages voisins se sont rassemblés. On entendait de toutes parts retentir les cris de : « Vive la dauphine ! Vive le dauphin ! » Le chemin était obstrué par la foule. Les stores de sa voiture étaient levés et tous les spectateurs pouvaient contempler à loisir sa beauté, son sourire enchanteur, sa douce physionomie. De jeunes paysans se disaient l'un à l'autre : « Qu'elle est jolie, notre dauphine! » »[b 13]. Le 14 mai enfin, à deux pas de Compiègne, la jeune dauphine rencontre le premier ministre, le duc de Choiseul, venu au devant d'elle[b 14].

La jeune princesse va ensuite attendre la cérémonie de son mariage près de Paris au château de la Muette, dont le dauphin avait pris possession en 1764[6].

Dauphine

Marie Antoinette en 1773.

Le 16 mai 1770, Marie-Antoinette épouse le dauphin à Versailles.

Le jour même des noces, un scandale d’étiquette a lieu : tout comme l'avaient fait leurs ancêtres en 1698 lors du mariage d'Élisabeth Charlotte d'Orléans, nièce de Louis XIV avec le duc Léopold Ier de Lorraine (grand-père de Marie-Antoinette), les princesses de Lorraine, arguant de leur (lointaine) parenté avec la nouvelle dauphine, ont obtenu de danser avant les duchesses, au grand dam du reste de la noblesse qui, suivant l'exemple des filles de Louis XV, murmure déjà contre « l’Autrichienne ».

Profil en médaillon de la dauphine Marie-Antoinette en 1770, allégorie de son mariage.

Le soir du 30 mai 1770, où l'on fête place Louis XV, à Paris, le mariage princier, est tiré un magnifique feu d'artifice dont une fusée tombe sur les pièces d'artifice destinés au bouquet final, créant un incendie, puis une véritable panique, conduisant à la mort de plusieurs centaines de victimes (131 selon les chiffres officiels, mais en réalité vraisemblablement autour de 400). Bouleversés, le dauphin et la dauphine - qui n'ont que 15 ans - financeront sur leur cassette personnelle une importante aide aux victimes et leurs familles.

La jeune fille, au physique agréable, est assez petite et ne possède pas encore la « gorge » si appréciée en France. Elle est blonde, d'un blond assez soutenu tirant sur le roux, qui, sous la poudre, prend des reflets rosés. Ses yeux bleu pâle sont un peu trop saillants. Son visage, au vaste front bombé, offre un ovale trop allongé. Le nez, qui promet d'être légèrement aquilin, offre peu de finesse[7]. La jeune dauphine a néanmoins beaucoup de grâce et une légèreté presque dansante dans sa façon de se mouvoir. Archiduchesse d’Autriche, arrière-petite nièce de Louis XIV, par sa grand-mère paternelle Élisabeth Charlotte d'Orléans duchesse de Lorraine et de Bar, objet vivant du « renversement des alliances » du roi Louis XV, elle attire dès son arrivée l’inimitié d’une partie de la cour. De plus, la jeune dauphine a du mal à s’habituer à sa nouvelle vie, son esprit se plie mal à la complexité et à la rouerie de la « vieille cour », au libertinage du roi Louis XV et de sa maîtresse la comtesse du Barry. Son mari l’aime mais l’évite, partant très tôt chasser ; elle peine à s’habituer au cérémonial français, au manque d’intimité et subit péniblement « l’étiquette », rigide mode d’emploi de la cour.

Elle est manipulée par « Mesdames Tantes », les filles du roi Louis XV, qui lui enseignent l’aversion pour la comtesse du Barry, ce qui agace Louis XV. Par ailleurs, Marie-Antoinette s’en fera bientôt une ennemie : pendant les premiers temps, elle refuse de lui parler mais, forcée par Louis XV, et poussée par Marie-Thérèse sa mère, et Mercy-Argenteau, elle finit par adresser la parole à la comtesse avec ces quelques mots « il y a bien du monde à Versailles aujourd'hui ». Marie-Antoinette ressortira humiliée de cet incident, surtout que Mesdames tantes verront en son acte une haute trahison. En outre, Vienne tente de la manipuler par le biais de la volumineuse correspondance qu’entretient sa mère avec le comte de Mercy-Argenteau, ambassadeur d’Autriche à Paris. Ce dernier est le seul sur lequel elle peut compter, car le duc de Choiseul, celui qui avait permis le rapprochement de la France avec l’Autriche, est tombé en disgrâce moins d’un an après le mariage, victime d’une cabale montée par Mme du Barry. Cette fameuse correspondance secrète de Mercy-Argenteau est une large source d’information sur les détails de la vie de Marie-Antoinette depuis son mariage en 1770 jusqu’au décès de Marie Thérèse Ire en 1780. Selon l’auteur du livre regroupant cette correspondance : « Ces documents originaux ne se contentent pas de nous introduire dans son intimité, ils nous révèlent aussi comment Marie-Antoinette, dépourvue d’expérience et dénuée de culture politique, fut manipulée par sa famille autrichienne à laquelle elle demeura toujours attachée ».

Reine de France

La reine en 1775 à 20 ans

Louis XV meurt le 10 mai 1774 et Marie-Antoinette devient reine de France et de Navarre à 18 ans. Toujours sans héritier à offrir à la France et toujours considérée comme une étrangère, la reine devient, dès l’été 1777, la cible de premières chansons hostiles qui circulent de Paris jusqu’à Versailles. S’entourant d’une petite cour d’amis vite qualifiés de favoris (la princesse de Lamballe, le duc de Lauzun, le baron de Besenval, le duc de Coigny puis la comtesse de Polignac), elle suscite les jalousies des autres courtisans. Ses toilettes et les fêtes coûteuses qu’elle organise profitent au rayonnement de la France, notamment pour la mode et le commerce du textile, mais sont critiquées, bien qu’elles soient une « goutte d’eau » dans les dépenses générales de la cour, des administrations, ou comparées au niveau de vie de certains princes de sang ou seigneurs menant grand train. Au total, les dépenses de la cour ne représentent que 7 % du budget du royaume, soit guère plus que les règnes précédents[7].

Pour retrouver à Versailles ce qu’elle a connu à Vienne – une vie plus détendue en famille avec ses amis –, elle va souvent avec quelques privilégiés au Petit Trianon (construit par Louis XV sous l'impulsion de sa maîtresse, Madame de Pompadour, qui décèdera avant que celui-ci ne soit terminé, puis que Louis XVI offrit à Marie-Antoinette). Elle fait construire un village modèle, le Hameau de la Reine, où elle installe des fermiers. Dans son petit théâtre, elle joue notamment Le Barbier de Séville de Beaumarchais et tient souvent des rôles de servante devant un Louis XVI amusé. Par son désir de plaisirs simples et d’amitiés exclusives, Marie-Antoinette va vite se faire de plus en plus d’ennemis, même à la cour de Versailles.

Vie à la cour

Marie-Antoinette 1775, Jean-Baptiste Gautier Dagoty.

Elle tente d’influencer la politique du roi, de faire et défaire les ministres, toujours sur les conseils intéressés de ses amis. Mais, contrairement à la rumeur, son rôle politique s’avère extrêmement limité. Le baron Pichler, secrétaire de Marie-Thérèse Ire, résume poliment l’opinion générale en écrivant : « Elle ne veut être ni gouvernée ni dirigée, ni même guidée par qui que ce soit. C’est le point sur lequel toutes ses réflexions paraissent jusqu’à présent s’être concentrées. Hors de là, elle ne réfléchit encore guère, et l’usage qu’elle a fait jusqu’ici de son indépendance le prouve assez, puisqu’il n’a porté que sur des objets d’amusement et de frivolité. »

Une véritable coterie se monte contre elle dès son accession au trône, des pamphlets circulent. Ses déboires conjugaux étant publics, on l’accuse d’avoir des amants (le comte d’Artois son beau-frère, le comte suédois Hans Axel de Fersen) ou même des maîtresses (la duchesse de Polignac), de dilapider l’argent public en frivolités ou pour ses favoris, de faire le jeu de l’Autriche, désormais dirigée par son frère Joseph II. Le château de Versailles se dépeuple, fui par des courtisans aigris ou préférant les plaisirs de Paris.

Mousseline et chou d'amour

Marie-Antoinette en 1787, par Élisabeth Vigée-Le Brun.

Après sept ans d'un mariage stérile, peu avant Noël 1778, Marie-Antoinette accouche de son premier enfant. Trois autres suivront.

Mais cela ne sert pas forcément Marie-Antoinette, car les libelles n'attendent pas pour affirmer que ses enfants, notamment ses fils, ne sont pas de Louis XVI ou qu'elle entretient une relation homosexuelle avec la princesse de Lamballe (libelle de Pierre-Antoine-Auguste Goupil, inspecteur de la Librairie à Paris, qui obtient de la reine de ne pas le diffuser contre 100 000 livres[8]).

La reine développe cependant une profonde affection pour ses enfants qui sont sa seule consolation face à ses ennemis de plus en plus nombreux. Après le scandale de l'affaire du collier, elle se tourne davantage vers sa famille et ne veut montrer d'elle que l'image de la mère de famille mais en vain. Alors qu'enceinte, elle se fait peindre par Madame Vigée-Lebrun entourée de ses enfants, elle perd son enfant au berceau en 1787.

Elle vivra très douloureusement cette perte et sur le tableau, à l'origine se trouvait peint, dans le berceau, Madame Sophie, dernier enfant du couple royal, décédée à l'âge de 11 mois. La Reine a voulu laisser le berceau vide comme un symbole de deuil et de douleur. Constante source de chagrin pour la reine qui ne pouvait retenir ses larmes chaque fois qu'elle passait devant l'œuvre, le tableau partira pour Vienne, Louis XVI finissant par l'offrir à son beau-frère Joseph II du Saint-Empire.

Maison de la Reine

Maison ecclésiastique

Grand Aumônier de la Reine
Premier Aumônier de la Reine
Aumônier ordinaire
Confesseurs de la Reine
  • 1770 - 1789 - l'Abbé Mathieu-Jacques de Vermond, professeur de Français, lecteur et confident, secrétaire de cabinet.
  • 1792, Abbé Poupart
  • 1793, l'abbé Magnin et l'abbé Cholet, prêtre vendéen, qui lui donna les sacrements la veille de sa comparution devant le Tribunal Révolutionnaire.

L’affaire du Collier

Article détaillé : Affaire du collier de la reine.

En juillet 1785, éclate l’« affaire du Collier » : les joailliers Boehmer et Bassange réclament à la reine 1,6 million de livres pour l’achat d’un collier de diamants dont le cardinal de Rohan a mené les tractations, au nom de la reine. La reine ignore tout de cette histoire et, quand le scandale éclate, le roi exige que le nom de sa femme soit lavé de l’affront. Le cardinal est arrêté en pleine journée dans la Galerie des Glaces, sous les yeux des nombreux courtisans. Le roi confie l’affaire au Parlement, l’affaire est jugée par Étienne François d'Aligre, qui conclut à la culpabilité du couple d’aventuriers à l’origine de l’affaire, les prétendus « comte et comtesse de la Motte » et disculpe le cardinal de Rohan et le comte de Cagliostro, abusés mais innocents.

Le cardinal de Rohan, aussi innocent que la Reine dans cette affaire, s’est laissé manipuler par Madame de La Motte, mais ceci ne serait pas arrivé si Marie-Antoinette avait accordé au Cardinal les faveurs qu’il recherchait depuis son entrée en Cour. En effet, le Cardinal, frivole et volubile, est ignoré par la Reine depuis qu'il a mécontenté sa mère, Marie-Thérèse, pendant l'occupation de son poste d'ambassadeur de France à la Cour d'Autriche, des années plus tôt. Lorsque « Madame de la Motte », qui se dit amie et cousine de Marie-Antoinette, lui confie les tractations avec le bijoutier, le Cardinal demande des preuves et on va jusqu’à lui présenter une fausse Marie-Antoinette (en réalité une comédienne nommée Rosalie qui ressemblait à s’y méprendre à la reine) un soir dans le parc de Versailles et inventer une fausse correspondance ; le naïf mais néanmoins ambitieux Cardinal accepte donc sa mission avec zèle, clamant à qui voulait l'entendre qu'il était enfin devenu « intime » de Sa Majesté.

La reine, bien qu’innocente, sort de l’affaire du collier déconsidérée auprès du peuple. Non seulement l'affront ne fut pas lavé, mais il généra une réelle campagne de désinformation étendue à tout le royaume. C'est à la même époque qu'est diffusée une littérature diffamante à propos des amours de la reine et du roi. Parmi ces représentations, l'une fut très populaire : Les Amours de Charlot et Toinette, caricatures du couple royal (1789), un succès de librairie.

Marie-Antoinette se rend enfin compte de son impopularité et tente de réduire ses dépenses, notamment en réformant sa maison, ce qui déclenche plutôt de nouveaux éclats quand ses favoris se voient privés de leurs charges. Rien n’y fait, les critiques continuent, la reine gagne le surnom de « Madame Déficit » et on l’accuse de tous les maux, notamment d’être à l’origine de la politique anti-parlementaire de Louis XVI.

La Révolution

1789

Portrait de Marie-Antoinette par Élisabeth Vigée Le Brun (1788).

Le 5 mai 1789 s’ouvrent les États généraux. Lors de la messe d’ouverture, Mgr de La Fare, qui est à la chaire, attaque Marie-Antoinette à mots à peine couverts, dénonçant le luxe effréné de la cour et ceux qui, blasés par ce luxe, cherchent le plaisir dans « une imitation puérile de la nature » (rapporté par Adrien Duquesnoy, Journal sur l’Assemblée constituante), allusion évidente au Petit Trianon.

Le 9 juin, le petit dauphin meurt. Pour éviter la dépense, on sacrifie le cérémonial de Saint-Denis. L’actualité politique ne permet pas à la famille royale de faire son deuil convenablement. Bouleversée par cet événement et désorientée par le tour que prennent les États généraux, Marie-Antoinette se laisse convaincre par l’idée d’une contre-révolution. En juillet, Necker démissionne. Le peuple interprète cette démission comme un renvoi de la part du roi. La reine brûle ses papiers et rassemble ses diamants, elle veut convaincre le roi de quitter Versailles pour une place-forte sûre, loin de Paris. Il faut dire que, depuis le 14 juillet, un livre de proscription circule dans Paris. Les favoris de la reine y sont en bonne place et la tête de la reine elle-même est mise à prix. On l’accuse de vouloir faire sauter l’Assemblée avec une mine et de vouloir faire donner la troupe sur Paris, ce qui est faux. Il est néanmoins vrai que la reine prônera l’autorité et restera toujours ancrée dans la conviction de la légitimité du pouvoir royal.

Le 1er octobre, un nouveau scandale éclate : lors d’un banquet donné par les gardes du corps de la Maison militaire, au régiment de Flandre qui vient d’arriver à Paris, la reine est acclamée, des cocardes blanches sont arborées, et selon la presse révolutionnaire des cocardes tricolores auraient été foulées. Paris est outré par ces manifestations contre-révolutionnaires, et par la tenue d’un banquet alors que le pain manque à Paris. Il en résulte les journées révolutionnaires d'octobre, dont l'historiographie (telle le récit romancé de Jules Michelet)[9] a retenue « la marche des femmes sur Versailles, disant aller chercher « le boulanger » (le roi), « la boulangère » (la reine) et le « petit mitron » (le dauphin) ».

Article détaillé : Journées des 5 et 6 octobre 1789.

Bien des gens attribuent faussement à Marie-Antoinette une boutade cynique : « S’ils n’ont pas de pain, qu'ils mangent de la brioche ! ». On lui a attribué cette phrase en 1789 alors qu’elle figure dans le Livre VI des Confessions de Jean-Jacques Rousseau publiées en 1782[10]. Aucune personne n'attribua la boutade à Marie-Antoinette à l'époque, les partisans de la Révolution compris.

La monarchie constitutionnelle

Marie-Antoinette vers 1792 ; pastel de Kucharski.

Louis XVI et Marie-Antoinette auraient pu se résoudre à demander de l’aide aux souverains étrangers, le roi d’Espagne Charles IV et Joseph II, frère de la reine. Mais le roi d’Espagne répond évasivement et, le 20 février 1790, Joseph II meurt. Des doutes et des controverses entre historiens subsistent sur ce possible appel à l’étranger. La Fayette suggère froidement à la reine le divorce. D’autres parlent à mots à peine couverts d’un procès en adultère, et de prendre la reine en flagrant délit avec le comte de Fersen.

Breteuil propose alors, fin 1790, un plan d’évasion. L’idée est de quitter les Tuileries et de gagner la place-forte de Montmédy, proche de la frontière. La reine est de plus en plus seule, surtout depuis qu’en octobre 1790 Mercy-Argenteau a quitté la France pour sa nouvelle ambassade aux Pays-Bas et que Léopold II, le nouvel empereur, un autre de ses frères, élude ses demandes d’aide, car, monarque philosophe, il pousse au contraire sa sœur à jouer le jeu de la nouvelle Constitution. Le 7 mars, une lettre de Mercy-Argenteau à la reine est interceptée et portée devant la Commune. C’est le scandale, une preuve, pense-t-on, du « comité autrichien », des tractations de la reine pour vendre la patrie à l’Autriche.

Le 20 juin 1791 débute la tentative d’évasion, stoppée le lendemain par l’arrestation à Varennes-en-Argonne.

Après Varennes

Marie-Antoinette en 1793 ; huile sur toile de Kucharski.

Interrogé à Paris par une délégation de l’Assemblée constituante, Louis XVI répond évasivement. Ces réponses, rendues publiques, suscitent le scandale, et certains révolutionnaires réclament la déchéance du roi. Marie-Antoinette, elle, correspond secrètement avec Barnave, Duport et Lameth qui veulent convaincre le roi d’accepter son rôle de monarque constitutionnel. Mais elle joue là un double jeu car elle espère seulement « les endormir et [...] leur donner confiance [...] pour les mieux déjouer après » (lettre de la Reine à Mercy). Elle écrit même à Fersen ces mots : « Quel bonheur si je puis un jour redevenir assez puissante pour prouver à tous ces gueux que je n’étais pas leur dupe ». Le 13 septembre, Louis XVI accepte la Constitution. Le 30, l’Assemblée constituante se dissout et est remplacée par l’Assemblée législative, cependant que des bruits de guerre avec les monarchies alentour, au premier rang desquelles l’Autriche, se font plus pressants. Le peuple est alors monté contre Marie-Antoinette, toujours appelée « l’Autrichienne ». Les pamphlets et journaux révolutionnaires la traitent de « monstre femelle » ou encore de « Madame Véto », et on l’accuse de vouloir faire baigner la capitale dans le sang. En avril 1792, la France déclare la guerre à la Prusse et elle subit dans un premier temps de sérieux revers. Le 3 août 1792, le manifeste de Brunswick, largement inspiré par Fersen, achève d’enflammer une partie de la population.

Le 10 août, c’est l’insurrection. Les Tuileries sont prises d’assaut, les gardes massacrés, le roi et sa famille doivent se réfugier à l’Assemblée, qui vote sa suspension provisoire et leur internement au couvent des Feuillants. Le lendemain, la famille royale est finalement transférée à la prison du Temple. Pendant les massacres de septembre, la princesse de Lamballe, proche amie de la reine et victime symbolique, est sauvagement assassinée, démembrée, et sa tête est brandie au bout d’une pique devant les fenêtres de Marie-Antoinette pendant que divers morceaux de son corps sont brandis en trophée dans Paris. Peu après, la Convention déclare la famille royale otage. Début décembre, a lieu la découverte officielle de l’« armoire de fer » dans laquelle Louis XVI cachait ses papiers secrets et dont l’existence est aujourd’hui sujette à débats. Le procès est désormais inévitable.

Le 26 décembre, la Convention vote la mort avec une majorité étroite. Louis XVI est exécuté le 21 janvier 1793. Le 27 mars, Robespierre évoque le sort de la reine pour la première fois devant la Convention. Le 13 juillet, le dauphin est enlevé à sa mère et confié au savetier Simon. Le 2 août, c’est Marie-Antoinette qui est séparée des princesses (sa fille Madame Royale et sa belle-sœur madame Élisabeth) et est conduite à la Conciergerie. Durant son séjour dans sa prison, Marie-Antoinette aurait développé un cancer de l'utérus. Lors du transfert, alors qu’elle s’est violemment cogné la tête, elle répond à ses geôliers qui s’en inquiètent son fameux « Rien à présent ne peut plus me faire de mal ». Son interrogatoire commence le lendemain.

Le procès

Marie-Antoinette au Tribunal révolutionnaire Gravure d’Alphonse François d’après Paul Delaroche.

Le 3 octobre 1793, Marie-Antoinette comparaît devant le Tribunal révolutionnaire, mené par l’accusateur public Fouquier-Tinville. Si le procès de Louis XVI avait conservé quelques formes de procès équitable, ce n’est pas le cas de celui de la reine. Le dossier est monté très rapidement, il est incomplet, Fouquier-Tinville n’ayant pas réussi à retrouver toutes les pièces de celui de Louis XVI. Pour charger l’accusation, il parle de faire témoigner le dauphin contre sa mère qui est alors accusée d’inceste par Jacques-René Hébert. Il déclare que la reine et Mme Élisabeth ont eu des attouchements sur le jeune Louis XVII. Marie-Antoinette ne répond rien et un juré en fait la remarque. Marie-Antoinette se lève et répond « Si je n’ai pas répondu c’est que la nature elle-même refuse de répondre à une telle accusation faite à une mère. J’en appelle à toutes celles qui peuvent se trouver ici ! ». Pour la dernière fois, la foule (et surtout les femmes) applaudit la reine. Une fois la séance terminée, celle-ci demande à son avocat « N’ai je pas mis trop de dignité dans ma réponse ? ». Selon Gaspard Louis Lafont d'Aussonne dans ses mémoires publiées en 1824, des personnes dans la foule dirent le matin du jugement « Marie-Antoinette s'en retirera : elle a répondu comme un ange, on ne fera que la déporter »[11].

On l’accuse également d’entente avec les puissances étrangères. Comme la reine nie, Herman, président du Tribunal, l’accuse d’être « l’instigatrice principale de la trahison de Louis Capet » : c’est donc bien un procès pour haute trahison. Le préambule de l’acte d’accusation déclare également : « Examen fait de toutes les pièces transmises par l’accusateur public, il en résulte qu’à l’instar des Messaline, Frédégonde et Médicis, que l’on qualifiait autrefois de reines de France et dont les noms à jamais odieux ne s’effaceront pas des fastes de l’histoire, Marie-Antoinette, veuve de Louis Capet, a été, depuis son séjour en France, le fléau et la sangsue des Français. » Il ajoute « la cause des troubles qui agitent depuis quatre ans la nation et ont fait tant de malheureuses victimes. »

Les dépositions des témoins à charge s’avèrent bien peu convaincantes. Marie-Antoinette répond qu’elle n’était « que la femme de Louis XVI, et qu’il fallait bien qu’elle se conform[ât] à ses volontés ». Fouquier-Tinville réclame la mort et fait de l’accusée « l’ennemie déclarée de la nation française ». Les deux avocats de Marie-Antoinette, Tronçon-Ducoudray et Chauveau-Lagarde, jeunes, inexpérimentés et n’ayant pas eu connaissance du dossier, ne peuvent que lire à haute voix les quelques notes qu’ils ont eu le temps de prendre.

Quatre questions sont posées au jury :

Marie-Antoinette devant le Tribunal révolutionnaire.

« 1. Est-il constant qu’il ait existé des manœuvres et des intelligences avec les puissances étrangères et autres ennemis extérieurs de la République, lesdites manœuvres et des intelligences tendant à leur fournir des secours en argent, à leur donner l’entrée du territoire français et à leur faciliter le progrès de leurs armes ?

2. Marie-Antoinette d’Autriche (…) est-elle convaincue d’avoir coopéré à ces manœuvres et d’avoir entretenu ces intelligences ?

3. Est-il constant qu’il ait existé un complot et une conspiration tendant à allumer la guerre civile à l’intérieur de la République ?

4. Marie-Antoinette est-elle convaincue d’avoir participé à ce complot et à cette conspiration ? »

Aux quatre questions, le jury répond « oui ». Lorsque le jury rend son verdict, il n’existe aucune preuve de l’accusation de haute trahison que l’on impute à la reine. Le dossier est vide de toute pièce.

Techniquement, au vu des pièces du procès, la condamnation n’est pas basée sur des faits avérés. On l’apprit plus tard, Marie-Antoinette communiqua des directives militaires confidentielles à l’Autriche dans le but de sauver sa famille, mais aussi « pour qu’enfin on se venge de tous les outrages qu’on reçoit dans ce pays-ci » (lettre de la Reine à Mercy). Mais la preuve n'en sera découverte que bien plus tard.

En réalité, il fallait condamner la « veuve Capet ». Robespierre a donc intégré au jury le médecin qui soignait la reine à la Conciergerie, lequel a indiqué aux autres jurés que de toute façon Marie-Antoinette était médicalement condamnée à brève échéance car elle avait de forts épanchements sanguins.

Exécution

Exécution de Marie-Antoinette à la Place de la Révolution,le 16 octobre 1793. (Anonyme. Musée Carnavalet).

La condamnation à mort, pour haute trahison, est prononcée le 16 octobre 1793 vers 4 heures du matin et Marie-Antoinette est exécutée le même jour vers midi. À l'annonce de la sentence, Marie-Antoinette rédige son testament, à l'attention de Madame Élisabeth, sœur de feu roi Louis XVI : « Je viens d’être condamnée, non pas à une mort honteuse, elle ne l’est que pour les criminels, mais à aller rejoindre votre frère  ». Elle termine son testament[12] par ces mots :

« Mon dieu ayez pitié de moi ! Mes yeux n'ont plus de larmes pour pleurer pour vous mes pauvres enfants. Adieu, Adieu ! »

Madame Élisabeth ne lira jamais ce testament.

Le matin du 16 octobre, Marie-Antoinette est menée mains liées sur une charrette – Louis XVI avait eu droit à un carrosse – de la Conciergerie jusqu'à la place de la Révolution (ancienne place Louis-XV, actuelle place de la Concorde). D'après ses historiens, elle subit avec dignité les sarcasmes et les insultes lancés par la foule massée sur son passage (elle mettra une heure pour traverser la place et monter à l'échafaud)[13]. Le peintre et révolutionnaire Jacques-Louis David, observant le cortège depuis la rue Saint-Honoré, en dessine un croquis resté légendaire. Selon ces mêmes historiens, c'est avec courage qu'elle monte à l'échafaud. En marchant sur le pied du bourreau Sanson, elle lui aurait demandé pardon. Ce seront ses dernières paroles.

Le jour de son exécution, la reine aurait perdu un escarpin, récupéré par un fidèle et conservé actuellement au musée des Beaux-Arts de Caen. Cette chaussure a fait l'objet d'une exposition[14] en 1989[15].

Inhumation

Monument de Louis XVI et de Marie-Antoinette d’Autriche à la basilique de Saint-Denis, France.

Tout comme pour Louis XVI, il a été ordonné que les bières des membres de la monarchie soient recouverts de chaux. Marie-Antoinette est inhumée avec la tête entre les jambes dans la fosse commune de la Madeleine, rue d’Anjou-Saint-Honoré (Louis XVIII fera élever à cet endroit la chapelle expiatoire située de nos jours sur le square Louis-XVI, seul endroit de Paris portant le nom du roi). Ses restes et ceux de Louis XVI furent exhumés le 18 janvier 1815 et transportés le 21 à Saint-Denis.

« Le premier crime de la Révolution fut la mort du Roi, mais le plus affreux fut la mort de la Reine » dit Chateaubriand.

Et Napoléon a dit de son côté : « La mort de la Reine fut un crime pire que le régicide ».

Acte de décès de Marie Antoinette dans l'état-civil de Paris

L'acte de décès de Marie Antoinette est rédigé le 24 octobre 1793. L'original de l'acte a disparu lors de la destruction des archives de Paris en 1871 mais il avait été recopié par des archivistes et des historiens. Voici ce que dit le texte, on remarquera que de nombreuses informations n'avaient alors pas été indiquées par les officiers publics de l'état civil :

« Du trois du second mois de l'an Second de la République française (24 octobre 1793).
Acte de décès de Marie Antoinette Lorraine d'Autriche du vingt-cinq du mois dernier (16 octobre 1793), âgée de trente-huit ans, native de..., domiciliée à..., veuve de Louis Capet.
Sur la déclaration faite à la commune par..., âgé de... ans, profession..., domicilié à..., ledit déclarant a dit être..., et par..., âgé de..., profession..., domicilié à..., ledit déclarant a dit être...
Vu l'extrait du jugement du tribunal criminel révolutionnaire et du procès-verbal d'exécution, en date du 25 du mois dernier.
Signé : Wolff, commis-greffier ;
Vu le certificat d... ;
Claude-Antoine Deltroit, officier public.
Signé : Deltroit[16] »

Le mythe

Marie-Antoinette est une femme célèbre et controversée de l'histoire de France. Après sa mort sur l'échafaud, les royalistes ont composé la légende de la reine martyre. Alors que de son vivant, la reine eut à subir des paroles ou des écrits malveillants, bien des souvenirs furent oubliés plus ou moins volontairement et camouflés après sa mort. L'un des principaux doutes qui subsistèrent concerne la nature de sa liaison avec Hans Axel De Fersen. Ce roman d'amour a tourmenté plusieurs générations de fidèles inconditionnels, qui considéraient que la soupçonner de quelque faiblesse amoureuse revenait tout simplement à commettre un crime contre la monarchie même. Pour les républicains, la dernière reine de l'Ancien Régime ne figure plus parmi les grandes criminelles de l'Histoire mais apparaît plutôt comme une princesse sotte, égoïste, et inconséquente, dont on minimise le rôle politique. Cependant, Marie-Antoinette suscite généralement intérêt et compassion jusqu'à nos jours. Madonna lui a ainsi rendu hommage dans de nombreux concerts.

Marie-Antoinette est la dernière souveraine à avoir porté le titre de reine de France. Marie-Amélie de Bourbon-Siciles (1782-1866), épouse de Louis-Philippe Ier, régna de 1830 à 1848 sous le titre de reine des Français.

Tous les 16 octobre, jour de sa mort, de nombreuses personnes viennent en pélerinage au château de Versailles et déposer des fleurs dans ses jardins[17].

Notes et références

  • (fr) Michel de Decker, Marie-Antoinette, les dangereuses liaisons de la reine, France Loisirs, 2005
  • (fr) Marie Célestine Amélie de Ségur d'Armaillé, Marie-Thérèse et Marie-Antoinette, Didier, 1870
  • Autres sources
  1. Biographie de Marie-Antoinette. Consulté le 5 juin 2011
  2. Henri Doering, W. A. Mozart, A. Bohné, 1860, 76 p. [lire en ligne (page consultée le 5 juin 2011)], p. 16 
  3. a, b et c Frères et sœurs de Marie-Antoinette, février 2011. Consulté le 5 juin 2011
  4. Ce rite est décrit dans une des premières scènes du film Marie Antoinette de Sofia Coppola.
  5. Histoire de la ville de Nancy. Consulté le 5 juin 2011
  6. Les voix du sang, Le Château de la Muette
  7. a et b Marie-Antoinette, une reine frivole et sentimentale – Débat entre historiens sur Europe 1 le 15 février 2011
  8. Maurice Tourneux, Marie-Antoinette devant l'histoire : Essai bibliographique, éd. BiblioBazaar, 2009, 192 p.
  9. Histoire de la Révolution, tome premier, Paris, Librairie internationale, 1869, p.300http://books.google.fr/books?id=39caAAAAYAAJ&dq=michelet%20r%C3%A9volution%20fran%C3%A7aise&pg=PP6#v=onepage&q=pain&f=false
  10. « […] je me rappelai le pis-aller d’une grande princesse à qui l’on disait que les paysans n’avaient pas de pain, et qui répondit : Qu’ils mangent de la brioche. » Jean-Jacques Rousseau, Confessions, livre VI
  11. Gaspard Louis Lafont d'Aussonne (1824) Mémoires secrets et universels des malheurs et de la mort de la reine de France p. 343. repris par Horace Viel-Castel (1859), Émile Campardon (1864), G. Lenotre (1902) et André Castelot (1957)
  12. Conservé à la Bibliothèque municipale à vocation régionale de Châlons-en-Champagne
  13. Cécile Berly, Marie-Antoinette et ses biographes, p 166
  14. Le soulier de Marie-Antoinette, Caen, Musée des Beaux-Arts, 1989
  15. Catriona Seth, Marie- Antoinette - Anthologie et dictionaire, Paris, Robert Laffont, 2006, p.724
  16. Archives de la Ville de Paris, double registre des actes d'état civil de la municipalité de Paris, folio 95 verso (registre détruit en 1871), cité notamment par Émile Campardon dans Marie-Antoinette à la Conciergerie, Paris, Jules-Gay Éditeur, 1864, page 241, mais aussi par Auguste Jal dans son Dictionnaire critique de biographie et d'histoire, Paris, Henri Plon, 1867, page 836, et cité également dans L'intermédiaire des chercheurs et curieux, année 1894, volume 30, Paris, 1894, page 352.
  17. Alain Baraton, Vice et Versailles - Crimes, trahisons et autres empoisonnements au palais du Roi-Soleil, Grasset, 2011, 208 p.

Voir aussi

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Iconographie

De 1779 à 1800, l’artiste française Élisabeth Vigée-Le Brun a fait une trentaine de portraits de Marie-Antoinette. Elle fut la première femme nommée peintre de la Cour.

  • Olivier Blanc, Portraits de femmes, artistes et modèles à l’époque de Marie-Antoinette, Didier Carpentier éditions, Paris, 2006, 356 pages in 4°, couverture cartonnée (liste de tous les portraits de Marie-Antoinette dont 70 reproduits en noir ou en couleur).

Articles connexes

Sources

  • En 1874, Auguste Geffroy et Alfred von Arneth publièrent pour la première fois la correspondance secrète entre l’impératrice Marie-Thérèse et le comte de Mercy-Argenteau.
  • En 1877, furent publiés pour la première fois, les papiers du comte de Fersen. Ils furent redécouverts en 1982 lorsque ses lointains héritiers les mirent en vente à Londres.
  • Correspondance de Marie-Antoinette, 1770-1793, éditée par Évelyne Lever, Tallandier, Paris, 2005 (ISBN 2-84734-197-8). L’éditrice a établi les textes à partir d’originaux conservés aux Archives d’État de Vienne ;
  • Marie-Antoinette : Correspondance. Clermont-Ferrand : Paléo, coll. « Sources de l’histoire de France : la Révolution française », 2004. [Pas d’information sur la maîtrise d’ouvrage]. 2 volumes :
  • Mémoires du baron de Besenval, édités par Ghislain de Diesbach de Belleroche, Mercure de France, coll. « Le temps retrouvé », 1987 (ISBN 2-7152-1459-6).

Jeanne Louise Henriette Genest Campan, plus connue sous le nom de Madame Campan, a été la femme de chambre de Marie-Antoinette à partir de 1770. Ses Mémoires semblent avoir été rédigés au début des années 1800 et décrivent la vie de la cour de l’intérieur, défendant la probité et l’inexpérience de sa maitresse. Ils ont été publiés en 1822 et réédités en 1999 (Éditions Mercure de France).

En 2006 le livre Marie-Antoinette Biographie de Antonia Fraser.

Bibliographie

  • Jean-François Autié, Journal de Léonard, coiffeur de Marie-Antoinette, Les éditeurs libres, Paris, 2007.
    Ce journal est apocryphe.
  • René Benjamin, Marie-Antoinette, Les Editions de France, 1940.
  • Simone Bertière, Marie-Antoinette l’insoumise, Les reines de France au temps des Bourbons, Éditions de Fallois, 2002.
  • Bernadette de Boysson et Xavier Salmon, Marie-Antoinette à Versailles : le goût d’une reine, catalogue de l’exposition au Musée des Arts décoratifs de Bordeaux, éd. Somogy, 2005 (ISBN 2850569097).
  • Jean Chalon, Chère Marie Antoinette, 1988.
  • Vincent Cronin, Louis and Antoinette, Collins, London, 1974 (ISBN 0809592169).
  • Michel de Decker et Michel Lafon, Marie-Antoinette : les dangereuses liaisons de la reine, Belfond, coll. « La vie amoureuse », 2005 (ISBN 2714441416).
  • Philippe Delorme, Marie-Antoinette, Pygmalion, coll. « Histoire des reines de France », 2001 (ISBN 285704609X).
  • Claude Dufresne, Marie-Antoinette, Le scandale du plaisir, Bartillat, Paris, 2006 (ISBN 2841003817).
  • Annie Duprat, Marie-Antoinette. Une reine brisée, Perrin, Paris, 2006 (ISBN 2-262-02409-X).
  • Jean-Claude Fauveau, Le Prince Louis cardinal de Rohan-Guéméné ou les diamants du roi, L'Harmattan, Paris, 2007.
  • Antonia Fraser, Marie-Antoinette, (trad. Anne-Marie Hussein), Flammarion, Paris, 2006 (ISBN 2-08-068915-0).
  • Mgr F. Genet, L’Abbé de Vermond (1735-1806), lecteur de Marie-Antoinette (1770-1789), Niort, 1940.
  • Paul et Pierrette Girault de Coursac, Marie-Antoinette et le scandale de Guines, Gallimard, 1962.
  • Paul et Pierrette Girault de Coursac, Louis XVI et Marie-Antoinette : vie conjugale - vie politique, O.E.I.L., 1990.
  • Paul et Pierrette Girault de Coursac, La Dernière Année de Marie-Antoinette, F.X. de Guibert, 1993.
  • Paul et Pierrette Girault de Coursac, Le Secret de la Reine : la politique personnelle de Marie-Antoinette pendant la Révolution, F.X. de Guibert, 1996.
  • Ryoko Ikeda, "La Rose de Versailles" 1972,2002 tome 1,2 et 3, Kana.
  • Évelyne Lever, Marie-Antoinette, Fayard, Paris, 1991 (ISBN 2213026599).
  • Évelyne Lever, Marie-Antoinette : la dernière reine, Gallimard, coll. « Découvertes », Paris, 2000 (ISBN 2070535223).
  • Marie-Antoinette - Correspondance (1770-1793), établie et présentée par Evelyne Lever, Tallandier, 2005. (ISBN 2-84734-197-8).
  • Évelyne Lever, C'était Marie-Antoinette, Fayard, 2006.
  • Évelyne Lever, Marie-Antoinette, Journal d'une reine, Tallandier, 2008
  • Jean-Clément Martin et Cécile Berly, Marie-Antoinette, Citadelles et Mazenod, 2010, 448 p.
  • Alain Sanders, La Désinformation autour de Marie-Antoinette, Atelier Fol’fer, 2006 (ISBN 2952421463).
  • Anne-Sophie Silvestre, Marie-Antoinette, Tome 1,2 et 3, Gallimard.
  • Stefan Zweig, Marie-Antoinette, Livre de Poche, 1999 (1re édition 1932)
  • « Marie-Antoinette : le remords français », dossier du Point no 1757, 18/05/06.

Filmographie

  • Marie-Antoinette est représentée en tant que poupée décapitée de Mercredi Addams, dans la série La Famille Addams. De nombreuses références y sont faites à la Révolution française et la guillotine.

Grand spectacle

Liens externes

Homonymies

Marie-Antoinette a laissé son nom à :

  • une pièce montée de trois étages, blanche, poudrée, légère et sucrée ;
  • une confiserie « Délices de Marie-Antoinette » ;
  • une perruque synthétique de couleur blanche ;
  • une suite de l’hôtel Ritz de Londres et de Paris ;
  • une huile de massage aromatique ;
  • un caveau d’une maison de champagne ;
  • un syndrome.

Voir aussi

Précédé par Marie-Antoinette d'Autriche Suivi par
Marie-Josèphe de Saxe
Dauphine de France
1770-1774
Marie Thérèse de France
Marie Leszczyńska
COA french queen Marie-Antoinette.svg
Reine de France
1774-1792
Joséphine de Beauharnais
(impératrice des Français)

Marie Thérèse de France
(succession légitimiste)


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