André Le Nôtre

André Le Nôtre
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André Le Nôtre portant sa médaille de l'Ordre de Saint-Michel (par Carlo Maratta)

André Le Nôtre (Paris, 12 mars 1613 - Paris, 15 septembre 1700) fut jardinier du roi Louis XIV de 1645 à 1700 et eut notamment pour tâche de concevoir l'aménagement du parc et des jardins du château de Versailles, mais aussi celui de Vaux-le-Vicomte et Chantilly. Il était un très fameux courtisan et réussit à s'acquérir une grande faveur auprès de Louis XIV. Sous une bonhomie probablement travaillée (en présence même du roi) qui lui valut le surnom de son vivant le « bonhomme Le Nôtre », il sut se placer à l'écart des intrigues de la Cour et s'attirer les bonnes grâces d'un roi passionné de jardins[1]. Il fut l'auteur des plans de nombreux jardins à la française.

Sommaire

Sa vie

Un avenir de jardinier

André Le Nôtre, fils de Jean Le Nôtre et de Marie Jacquelin, naît dans une famille de jardiniers le 12 mars 1613 et est baptisé le même jour à l'église Saint-Roch à Paris[2]. Son père, Jean Le Nôtre, était jardinier du roi aux Tuileries ainsi que son grand-père maraîcher fournissant semences et fumier à la Cour de Marie de Médicis puis devenant jardinier du roi[3]. Son parrain, André Berard, sieur de Maisoncelle, originaire de la commune de Montchamp en Normandie, est contrôleur des jardins et le mari de sa marraine, Claude Mollet, est un illustre jardinier. André vit donc dans une famille de jardiniers et acquiert rapidement un savoir-faire pratique qu'il complète de connaissances théoriques.

Une adolescence studieuse

Il est d'abord attiré par des arts qui rentreront en jeu dans son futur métier de jardinier du Roi. Il apprend l’agronomie, l’hydrologie, les mathématiques, la peinture et l'Architecture. Il entre alors comme pupille dans l'atelier de Simon Vouet, peintre du roi Louis XIII[4]. Il apprendra alors l'art du classicisme et des perspectives, et devient l'ami de Charles Le Brun rencontré dans l'atelier de Vouet. François Mansart lui permet d'étudier l'architecture pendant plusieurs années.

Les débuts de jardinier

En 1635, fort de toutes les compétences acquises durant ses expériences artistiques précédentes, il décide de devenir jardinier : il est nommé premier jardinier du duc d'Orléans frère du roi qui lui confie ses jardins de Saint-Cloud et du Luxembourg. Le premier grand jardin français portant la marque distinctive de Le Nôtre fut le jardin du château de Wattignies (sud de Lille), terminé en 1640 et construit par le seigneur de Wattignies, Philippe de Kessel. On estime que le jardin fut dessiné vers 1635-1637, quand Le Nôtre avait entre 22 et 24 ans. On y retrouve les allées en angle aigus, l'exposition Sud Est (classique), le dégradé des essences d'arbres en perspective, les grands pots Médicis sculptés dans la pierre, le Théâtre de verdure. Cette première réalisation lui apportera ses premiers grands revenus et surtout la première référence qui lancera sa réputation.

Il succède à son père comme premier jardinier du roi aux Tuileries en 1637, son père ayant réussi à lui obtenir la survivance de sa charge.

Le 16 janvier 1640 à Paris[5], André Le Nôtre se marie avec Françoise Langlois, qui lui survivra et avec qui il aura trois enfants, tous morts jeunes. Trois ans plus tard, il est nommé "dessinateur des Plants et Parterres" d'Anne d'Autriche qui impose son goût baroque espagnol . En 1645-1646, il modernise les jardins du château de Fontainebleau.

André Le Nôtre exerce son métier avec le projet des jardins du château de Vaux-le-Vicomte, initié par Nicolas Fouquet. Il travaille alors en coordination avec Louis Le Vau et Charles Le Brun entre 1656 et 1661, réalisant parterres, plans d'eau, bosquets et un renversement de perspective. Ce chantier fait de lui un illustre jardinier mondial. En 1657 il achète la charge de conseiller du Roi et contrôleur général des bâtiments du Roi.

Après l'arrestation de Fouquet en 1661, André Le Nôtre est engagé par Louis XIV pour réhabiliter les jardins de Versailles qui sera son autre travail majeur entre 1662 - 1687, jouant avec les parterres de broderie, installant la statuaire et les multiples jeux d'eau.

Il dessine et réalise alors de nombreux projets à travers la France et aussi l'étranger : Greenwich pour Charles II d'Angleterre en 1662, 1662 - 1684 : Le Nôtre transforme pour le Grand Condé les jardins du château de Chantilly, jardins du château de Saint-Germain-en-Laye en 1663-1672 (son projet de perspective déviée l'emportant sur celui de Le Vau), jardins du château de Saint-Cloud pour Philippe d'Orléans en 1665 - 1693.

Par ailleurs, en construisant un pont traversant la Seine, il achève partiellement la voie royale dont Louis XIV avait besoin, entre Saint-Germain-en-Laye et Paris, notamment après la Fronde. Il s'agit de l'origine de l'Axe historique.

La fin de sa vie

En 1666, Colbert charge Le Nôtre d'embellir le jardin des Tuileries qu'il transforme en profondeur, ouvrant plusieurs perspectives dont l'une servira de tracé à la future avenue des Champs-Élysées. Entre 1670 - 1683, il travaille sous les ordres du même Colbert au remaniement des jardins de son château de Sceaux.

Il conçoit un projet pour le château de Racconigi en Italie en 1670 et refait les jardins de Venaria Reale en Italie en 1674 - 1698.

Le Nôtre est anobli par Louis XIV en 1675 : il reçoit à cette occasion l'Ordre de Saint-Michel et l'Ordre de Saint-Lazare (1681). Quand Louis XIV lui impose le port des armoiries, il se moque en disant qu’il a déjà « trois limaçons couronnés d’un trognon de choux ». Le roi lui fait composer un blason « de sable à un chevron d'or accompagné de trois limaçons d'argent, les deux du chef adossés et celui de la pointe coutourné » et prendre pour armoiries « une pomme de choux avec une bèche et un râteau »[1]. Il forme de nombreux disciples, dont son neveu, Claude Desgots.

En 1678, il visite l'Italie et juge que « les jardins ne s'approchent pas de ceux de son pays ». Il en profite pour rendre visite au Bernin, âgé de 81 ans, ainsi qu'au pape Innocent IX en 1679. L'anecdote est racontée par Saint-Simon : le pape fait appel à lui pour modifier le tracé des jardins pontificaux. À la fin de leur entrevue, Le Nôtre déclare « Je ne me soucie plus de mourir puisqu'à présent j'ai devisé familièrement avec les deux plus grands hommes du monde, Votre Sainteté et le Roi mon maître ». Le pape répond « Votre roi est un grand prince victorieux, moi je ne suis qu'un pauvre prêtre. Il est encore assez jeune, moi je suis vieux ». Le jardinier rétorque « Mon révérend Père, vous vous portez bien, vous enterrez tout le Sacré Collège ». Les deux hommes éclatent de rire et, sous le coup de l'émotion, il embrasse sur les deux joues le pape puis baise sa mule. Le duc de Créquy parie avec le roi Louis XIV mille louis que cette scène est une baliverne ; il perd son pari qui confirme le surnom du jardinier le « bonhomme Le Nôtre »[6]. La véracité de cette anecdote est toutefois contestée par Voltaire, qui se fonde sur le témoignage d'un disciple de Le Nôtre[7].

Le Nôtre entre en 1681 à l'Académie royale d'architecture[8]. Il intervient dans l'aménagement des jardins du château de Meudon pour Louvois en 1679-1691 et participe aux aménagements du château de Marly-le-Roi, dernière résidence voulue par Louis XIV, en 1692. Il est cependant agacé par les velléités du Roi-Soleil à vouloir concevoir ses propres jardins[9]. Il cesse donc de travailler pour ce dernier tout en lui offrant ses plus belles œuvres d'art en 1693. Il fait encore des projets : il envoie par lettre ses instructions pour les château de Charlottenburg et château de Cassel en Allemagne en 1694 et adresse à Guillaume III d'Angleterre des plans pour le château de Windsor en 1698.

André Le Nôtre meurt à Paris dans le palais des Tuileries[10], auprès de sa femme et de ses nièces et neveux qu'il a adoptés, le 15 septembre 1700 à l'âge de 87 ans. Ses obsèques sont célébrées en l'église Saint-Germain-l'Auxerrois puis il est inhumé en l'église Saint-Roch[11]. Selon ses désirs, il est inhumé sans cérémonie, le tableau d’autel de sa chapelle est orné d’une peinture de Jean Jouvenet et aucune armoirie ne figure sur sa pierre tombale. Sa sépulture est profanée lors de la Révolution.

Il n'a laissé cependant aucun écrit pédagogique, ni journal ni mémoires. Il reste quelques courriers adressés aux grands de son siècle. L'un des premiers à théoriser son apport est Antoine-Joseph Dézalliers d'Argenville qui écrit en 1709 la Théorie et la pratique du jardinage, reprenant ainsi ses principales œuvres. Ayant chiné depuis les années 1650 auprès de brocanteurs et antiquaires, il lègue les œuvres importants de sa collection (tableaux de peinture, sculptures, porcelaines, médailles modernes et estampes) au roi en 1693[1].

Il laisse derrière lui de nombreux jardins aménagés à la française reconnaissables par leurs perspectives et leurs géométries parfaites, connus et renommés partout dans le monde.

Ses collections

Le Nôtre possédait plusieurs centaines de tableaux de maîtres qu'il donna en partie à Louis XIV : (sélection)

  • De l'Albane, Actéon métamorphosé en cerf, Salmacis et Hermaphrodite, Apollon et Daphné, Louvre ;
  • De Cornelis Van Poelenburgh, La lapidation de Saint Étienne, Louvre ;
  • De Nicolas Poussin; Le Christ et la femme adultère, Moïse sauvé des eaux, Saint Jean baptisant le peuple, Louvre ;
  • Du Dominiquin, Adam et Ève, musée des Beaux-arts de Grenoble.

Autres jardins de Le Nôtre

Parterres du Midi, Château de Versailles

Avenues

Notes et références

  1. a, b et c Franck Ferrand, émission Au cœur de l'histoire sur Le Nôtre, Europe 1, 25 avril 2011
  2. L'acte original de son baptême a disparu dans les incendies de 1871, mais Auguste Jal en donne les principaux éléments. André Le Nôtre est baptisé en l'église Saint-Roch à Paris le 12 mars 1613, son père Jean Le Nôtre est qualifié de "surintendant du jardin des Tuileries", ayant obtenu la charge de « dessinateur des Plants et Jardins du Roi ». Son parrain est André Bérard, sieur de Maisoncelle, contrôleur général des jardins du Roy. Sa marraine est Claude Martigny, femme de Claude Mollet, "premier jardinier de Sa Majesté au jardin des Tuileries". (Auguste Jal, Dictionnaire critique de biographie et d'histoire, Paris, Henri Plon, 1872, page 771)
  3. Il put ainsi marier une de ses filles au pépinériste du roi, l'autre au Garde des Orangers.
  4. Témoignage de ses contemporains, sans qu'aucune archive ne le confirme.
  5. Dominique Garrigues, Jardins et jardiniers de Versailles au Grand Siècle, Paris, Champ Vallon, 2001, p. 136
  6. Erik Orsenna, Portrait d'un homme heureux, édition Folio, p. 122
  7. Voltaire, Le Siècle de Louis XIV, 1751. Édition de la Pléiade, p. 1220.
  8. David de Pénanrun, Roux et Delaire, Les architectes élèves de l'école des beaux-arts (1793-1907), Librairie de la construction moderne, 2e éd., 1907, p. 129.
  9. Erik Orsenna, Portrait d'un homme heureux, édition Folio, p. 135
  10. Sa maison prés du pavillon de Marsan était entourée d’un jardin qu’il entretenait lui même.
  11. Extrait du registre paroissial de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois à Paris : Du jeudy 16e septembre 1700, avec la permission de son Éminence monseigneur le cardinal de Noailles, archevêque de Paris, et celle de M. le curé, après l'office des deffuncts chanter, le corps de messire André Le Nostre, chevalier de l'ordre de Saint-Michel, conseiller du Roy, controlleur général ancien des Bâtiments, Arts et Manufactures de France, âgé de quatre-vingt sept ans, décédé hier à quatre heures du matin dans son appartement aux Tuilleries, a esté porté en carosse de cette église en l'église paroissiale de Saint-Roch, où il sera inhumé, en présence de messire Nicolas Brevac de Redemont, écuyer du Roy, gouverneur des pages de la grande écurie du Roy, beau-frère du deffunct, et de messire André Rombes, chanoine de l'Église de Paris, neveu du deffunct, qui ont signé. (Registre détruit par l'incendie de 1871 mais acte recopié par Eugène Piot dans Etat civil de quelques artistes français extrait des registres paroissiaux des anciennes archives de la ville de Paris, Paris, Librairie Pagnerre, 1873, page 75)
  12. Histoire de Saint Jean de Braye, résumé historique, groupe histoire locale du comité des sages de Saint Jean de Braye, réédition en juin 2004, 31 p.


Voir aussi

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Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

  • Dominique Garrigues, Jardins et jardiniers de Versailles au Grand Siècle, Éditions Champ Vallon, 2001 Lire en ligne

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